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1er dimanche de l 'Avent A - 28 novembre 2010

 

 

Le jour est tout proche!

Exhortation à la vigilance : Matthieu 24, 37-44
Autres lectures : Isaïe 2, 1-5; Psaume 121(122); Romains 13, 11-14a

 

En grec comme en français le mot jour peut s’entendre d’une date déterminée ou de la période de clarté qui va du lever du soleil jusqu’à son coucher (il y a aussi d’autres acceptions du mot signalées dans les dictionnaires). Lorsque Paul écrit que le jour est tout proche il pense à l’arrivée prochaine de la lumière par rapport aux ténèbres de la nuit. Par ailleurs on sait bien que ce vocabulaire revêt une portée symbolique. La nuit représente le monde présent, encore soumis au pouvoir du péché et de la mort; le jour, l’avènement du Christ dans un monde nouveau (voir, par exemple : 1 Thessaloniciens 5, 1-11, spécialement vv. 4-8). Le jour dont Paul annonce l’arrivée prochaine est celui du salut.

     Dans l’histoire il existe des jours exceptionnels, marqués par un événement mémorable, par exemple, le Jour J, le 6 juin 1944. Dans la vie des individus, on trouve aussi des jours spéciaux, qu’on attend avec impatience : Noël, le début des vacances, le premier jour de travail, le mariage … Pour les chrétiens, le jour par excellence est celui de la venue du Royaume déjà commencé par la résurrection de Jésus mais dont le plein accomplissement est toujours objet d’espérance. Ils doivent se préparer à sa venue en vivant déjà à la manière du monde nouveau (v. 13) et en restant vigilants (v. 11).

Veillez donc car… (Mt 24, 42)

     C’est presque un lieu commun d’affirmer que les premiers chrétiens attendaient la venue glorieuse du Christ dans un délai très court puisque sa résurrection, premier acte de la résurrection des morts, est l’étape préalable au jugement universel et à l’établissement du Royaume de Dieu (cf. 1 Th 4, 13-18). De fait, il n’est pas certain que le contenu de l’attente ait été aussi clair pour tout le monde. Certains espéraient sans doute d’abord une amélioration de leur sort par un changement politique : expulsion des Romains, renversement de l’aristocratie juive collaboratrice avec les occupants, établissement d’un royaume authentiquement juif (cf. Ac 1,6). Pour d’autres, le monde actuel est condamné et le salut ne peut venir que de Dieu établissant une création nouvelle (cf. Ap 21, 1). Les uns et les autres pouvaient trouver dans les Écritures (notre Ancien Testament) des textes pour justifier leur opinion. Ils se rassemblent en raison de leur foi en Jésus reconnu comme Messie et Sauveur. D’une manière ou d’une autre, le salut espéré sera réalisé par lui. Maintenant qu’il est entré dans la gloire de Dieu, il viendra du ciel pour réaliser sa promesse et établir son Royaume (cf. Mt 24, 30-31).

     Le discours de Jésus commence par une question venant des disciples : Dis-nous quand cela (la destruction du Temple) se produira et quel sera le signe de ton avènement et de la fin du monde? (Mt 24, 3). Ainsi formulée, la demande associe étroitement trois réalités : le fait historique de la prise de Jérusalem et de la fin des institutions de l’Ancienne Alliance (en 70 de notre ère) et les événements transhistoriques que sont la venue glorieuse du Christ et la fin du monde. On doit cependant remarquer que la question de la date ne s’applique qu’au premier élément; pour les deux autres, les disciples veulent connaître le signe qui permettra de les identifier.

On mangeait, on buvait, on se mariait (v. 38)

     Contrairement au livre de la Genèse (cf. Gn 6, 5) et aux autres écrits qui en dépendent, Jésus ne porte pas un jugement sévère sur la moralité des humains avant le déluge. Les activités auxquelles ils se livraient étaient, en somme, tout à fait normales. Mais, dans leur souci d’assurer leur bien-être quotidien, ils avaient oublié l’essentiel. Leur horizon se limitait à la vie présente et à la satisfaction de leurs besoins. C’est pourquoi ils ne se sont doutés de rien jusqu’au déluge qui a les tous engloutis (v. 39).

     Jésus rappelle ces souvenirs à titre de comparaison. Ceux qui seront contemporains de l’avènement du Fils de l’homme risquent d’être, eux aussi, pris par surprise parce qu’ils ne se seront pas préparés. On peut évoquer ici la parabole du semeur : Celui qui a été semé dans les épines, c’est celui qui entend la Parole mais le souci du monde et la séduction de la richesse étouffent cette Parole qui demeure sans fruit (Mt 13, 22).

Veillez donc (v. 42)

     Au moment où Matthieu écrit son évangile, l’Église est confrontée à deux défis contradictoires : d’une part, calmer la fièvre de ceux qui attendent la venue glorieuse du Christ d’un instant à l’autre; d’autre part, stimuler la vigilance de ceux qui se sont si bien habitués à vivre au rythme du monde ambiant qu’ils risquent d’oublier que l’espérance du Royaume est toujours un élément essentiel de l’existence chrétienne. En fait, la deuxième préoccupation domine chez Matthieu. Celui-ci ne veut pas effrayer ses lecteurs par la perspective de la fin prochaine de l’histoire mais réveiller l’ardeur de ceux qui commençaient à douter de la réalisation des promesses (voir, par exemple : la parabole du majordome Mt 24, 45-51 ou celle des vierges Mt 25, 1-13). Il rappelle l’essentiel de l’enseignement de Jésus à ce sujet : la venue du Fils de l’homme est certaine (v. 44), la date de cette venue est inconnue, il est inutile de chercher à la deviner (v. 42), l’attitude nécessaire pour s’y préparer est la vigilance (vv. 42.44).

     Chaque année, la liturgie propose, au début de l’Avent, un texte d’évangile annonçant la venue glorieuse du Christ (année B : Mc 13, 33-37; année C : Lc 21, 25-28.34-36). Ce choix s’accorde avec la signification du mot Avent : venue, avènement. L’année liturgique s’ouvre sur l’évocation du terme de l’histoire comme elle se conclut avec la célébration de la royauté universelle du Christ. La fête de Noël, en rappelant la venue du Fils de Dieu dans cette histoire célèbre aussi l’attente de cette nouvelle venue dans la Gloire; les deux sont inséparables. Le choix de cette page d’évangile détourne de la tentation de ne voir en Noël que le souvenir émouvant d’un événement lointain. Depuis que le Fils de Dieu habite notre monde, celui-ci est en marche vers la pleine réalisation du salut, malgré toutes les apparences contraires.

Il arrivera dans l’avenir (Is 2,2)

     Une traduction plus littérale du 1er verset de cette lecture donne : La parole que vit Isaïe fils de Amoç… Une parole qui se fait voir, ce n’est pas loin de le Verbe s’est fait chair… (Jn 1, 14). Bien sûr, le prophète Isaïe n’avait pas reçu la révélation de l’incarnation du Verbe mais il percevait déjà que la Parole de Dieu n’est pas qu’un bruit qui se fait entendre. Elle est efficace et produit elle-même ce qu’elle signifie.

     Ce que vit Isaïe concerne les jours à venir (v. 2). Nous retrouvons l’idée d’un moment de l’histoire où se produira un changement majeur. La date de cet événement demeure mystérieuse. Même s’il s’agit d’une perspective lointaine, la promesse qu’elle contient est assurée car la Parole de Dieu ne peut pas décevoir.

     L’exaltation de Jérusalem et de son Temple signifient la souveraineté universelle de Dieu. Tous les peuples se mettront en marche  (cf. v. 3) parce que tous reconnaitront le Dieu de Jacob comme leur roi et leur juge. Jérusalem sera le centre du monde renouvelé par la Parole du Seigneur. Cette transformation aura pour conséquence la disparition de la guerre et la rénovation de la création. Les humains se livreront désormais exclusivement à des occupations pacifiques (v. 4). Les jours à venir vus par Isaïe, ce sont déjà le Royaume inauguré par Jésus et qui se réalisera pleinement lors de sa venue glorieuse.

 

Jérôme Longtin, ptre

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2249. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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