Le jugement dernier : une question de solidarité!
Le jugement dernier : Matthieu 25, 31-46
Autres lectures : Ézéchiel 34, 11-12.15-17; Psaume 22(23); 1 Corinthiens 15, 20-26.28
Qu’est-ce qui va se passer après la mort? Comment va se passer la fin des temps? Qui sera sauvé ou condamné? Ces questions sont largement reprises dans notre culture par des films, des livres, des chansons. Elles nous fascinent parce qu’elles n’ont pas de réponses et nous laissent devant un mystère. Aussi, elles font ressortir nos angoisses les plus profondes. Qui d’entre nous n’a pas le désir que sa vie ne s’arrête pas? Et pourtant, comme le disait un humoriste, dans la vie il y a deux certitudes : mourir et payer des taxes. Notre vie va avoir une fin. Et, cette fin nous angoisse puisqu’on se retrouve devant l’inconnu.
De la fin du monde, à la faim du monde
Longtemps, la foi chrétienne a fourni plusieurs images à propos du paradis et de l’enfer. Il faut s’avouer que beaucoup de celles-ci n’ont que peu de racines bibliques et repose sur l’imaginaire du Moyen-âge, par exemple sur la divine comédie du poète italien Dante.
L’extrait de l’Évangile de Matthieu présenté aujourd’hui nous donne le point de vue de Jésus sur la question. Sur quelle base est-ce que nous serons jugés? Est-ce que ce sera sur notre fréquentation religieuse? Est-ce que ce sera sur notre morale sexuelle? Non! Le jugement porte sur l’attention faite aux plus petits qui ont faim, soif, qui sont nus, exclus ou en prison. L’enjeu est grand : Le châtiment éternel ou la vie éternelle. Le jugement dernier est une question de solidarité. La fin du monde nous amène à agir pour enrayer la faim du monde.
Le contexte littéraire
Ce texte n’est pas une parabole comme les autres. En fait, il ne s’agit même pas d’une parabole. C’est une description prophétique du jugement dernier qui a une place de choix dans l’Évangile de Matthieu. Elle termine le cinquième et dernier discours de Jésus, juste avant que commence le récit de la passion. C’est en quelque sorte le testament de Jésus, le résumé de l’enseignement qu’il laisse à ses disciples. Cette section a été introduite par une question des disciples voulant savoir quand aura lieu la fin des temps. Jésus ne répondra pas à la question de la date, mais il commencera par expliquer comment se préparer, puis, avec ce texte, il nous donne sa vision du jugement dernier.
Le tableau dépeint est assez simple. D’un côté il y a les « bénis » et de l’autre, les « maudits ». La différence entre les deux est claire. Les uns ont pratiqué des actes de charité, les autres non. La liste de ces actes prend racine dans la culture biblique qui, bien avant Jésus, proposait ces actions (par exemple Tb 1, 16-20). Seule la visite en prison est une nouvelle pratique qui ne figurait pas parmi les listes de l’Ancien Testament. Probablement que l’ajout est en lien avec les persécutions des premiers chrétiens qui se font jeter en prison.
Ces actes de charité, répétés comme un refrain, rejoignent le combat pour les droits humains en visant les détresses les plus élémentaires et les plus profondes : la faim, la marginalisation sociale de l’étranger, la captivité, la vulnérabilité de qui est sans vêtements.
Le critère de jugement est clair. C’est l’amour du prochain qui se traduit par des gestes concrets. On pourrait s’opposer et se demander pourquoi la foi au Christ n’est pas un critère du jugement. Matthieu répondrait surement qu’une foi qui ne se concrétise pas en suivant le Christ dans l’amour et le service de l’autre ne vaut pas grand-chose.
Qu’est-ce que le Fils de l’homme?
Le fils de l’homme est une figure énigmatique dont parlent Daniel (7,13) et Hénoch (40) dans des textes apocalyptiques. C’est le justicier de la fin des temps. À plusieurs reprises, dans les évangiles, Jésus s’identifie lui-même à cette figure, souvent dans des contextes évoquant son rôle dans l’aboutissement de l’histoire humaine.
Christ, roi de l’univers?
En ce jour, l’Église célèbre le Christ comme roi de l’univers. Mais sa royauté n’a rien à voir avec les royautés que nous avons connues au cours de l’histoire humaine. Trop souvent les royautés sont marquées par des abus de pouvoir dans le but d’amasser richesses et prestige sur le dos des plus faibles. Malheureusement, encore aujourd’hui, plusieurs dictateurs mènent leurs royaumes de cette façon. Au contraire de ceux-ci, le royaume de Jésus est celui de la solidarité extrême. N’y sont admis que ceux qui répondent aux cris des autres.
Aujourd’hui…
La bonne nouvelle, c’est que ce royaume de solidarité commence ici avec nous. Dès maintenant, nos actes ont une saveur d’éternité. La vie éternelle est déjà commencée. Pas question d’attendre demain, la mort ou même la fin du monde pour rencontrer Dieu. Dès maintenant, mystérieusement, à travers des actes simples, mais importants, se tisse notre rencontre avec le Christ.
Réfléchissons sur nos expériences passées. Ce que vous avez fait au plus petit, c’est à moi que vous l’avez fait. Est-ce qu’il n’y a pas des moments dans notre vie, parfois courts, mais d’une force et d’une douceur extraordinaires, où nous croyons distinguer sur le visage du petit, du faible secouru ou visité (dans le sourire? l’éclat du regard?) quelque chose qui suggère un autre visage? Oui, nous vivons tous de tels instants; ils sont précieux pour notre vie de foi et pour notre vie tout court.
Qui sont ces petits aujourd’hui? Il y en a beaucoup. Spontanément on pourrait dire les itinérants, les déficients intellectuels, les travailleuses du sexe, les pauvres, les immigrants, les enfants soldats, etc. Que faisons-nous pour les aider? Si la vie éternelle nous intéresse, peut-être qu’il faudrait oser s’impliquer. Plus que ça, ce chapitre de Matthieu indique que c’est le lieu de rencontre de Jésus. Vous voulez être avec le Christ, oui il y a la prière, mais avant tout, il y a l’implication sociale.
L’accent du texte est clair : l’amour du prochain. En particulier « les plus petits » c’est-à-dire tous ceux qui sont dans le besoin. Ce texte nous interpelle personnellement : De quel côté sommes-nous? Est-ce que nous aidons les exclus ou est-ce que nous restons les bras croisés?
Source: Le Feuillet biblique, no 2291. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins
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