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33e dimanche ordinaire A - 16 novembre 2014

 

Entrons dans la joie du Ressuscité

 

La trahison de Judas : Matthieu 25, 14-30
Autres lectures : Proverbes 31, 10-13.19-20.30-31; Psaume 127(128); 1 Th 5, 1-6

 

D'emblée nous éprouvons un malaise à la lecture évangélique de ce dimanche. N'est-il pas choquant de constater une telle disparité dans la distribution des dons aux trois serviteurs ?  Puis, la sentence finale n'est-elle pas trop sévère ? Terrifiante et insoutenable ?

     Spontanément, on est porté à scruter l'agir du troisième serviteur et pourtant, le comportement des deux premiers partenaires se révèle riche de valeurs humaines et spirituelles. Notons que ce récit évangélique du jour s'inscrit dans la suite de la parabole des dix vierges (25, 1-13) qui se termine par la recommandation : Veillez donc, car... Sans estomper ce conseil, la parabole des talents met l'accent sur le jugement en lien étroit avec l'enseignement sur le jugement dernier (25, 31-46) et le récit de la passion de Jésus (26, 1 - 28, 1).

Le serviteur recroquevillé sur lui-même

     En premier, nous allons nous intéresser au troisième serviteur dont l'attitude contraste tellement avec celle des deux autres. Son comportement stérile fait ressortir la confiance des deux premiers serviteurs. Ce serviteur malheureux dévoile lui-même ce qui occupe son esprit et son cœur : Je savais que tu es un homme dur: tu moissonnes là où tu n'as pas semé, tu ramasses là où tu n'as pas répandu le grain. J'ai eu peur (vv. 24-25).

     Voilà donc la perception qu'il a du maître, toute négative, pleine d'aigreur! Pourtant il est dans l'ordre des choses de labourer la terre, de la préparer pour qu'elle reçoive la semence et assure la récolte, il va de soi de travailler. Quel rapport cet homme a-t-il entretenu dans son esprit et son cœur avec le maître parti en voyage ? Au cours de cet intervalle, son sens des responsabilités, sa créativité, son inventivité pouvaient se déployer puisqu'il avait la gérance du pécule; autonome, il était et il pouvait prendre le risque de doubler la somme, en préservant l'acquit. Comment, par quel ressentiment a-t-il pu laisser son cœur s'endurcir et porter un jugement de valeur sévère sur son maître (v. 24), alors que le récit, par la suite, mentionne la générosité du maître à l’égard des deux partenaires engagés et fidèles ? Est-il jaloux de ce qui est confié aux deux autres ? Est-il convaincu qu'il a été défavorisé, qu'en définitive le maître ne lui a rien confié ? Il ressemble étrangement à l'aîné de la parabole du père prodigue ou aux ouvriers de la première heure, revendicatifs et mécontents. Tant qu'à être prudent, pourquoi n'a-t-il pas déposé cette somme considérable à la banque pour qu'elle fructifie ? Il est à plus d’une contradiction près, lorsqu’il enfouit l’argent de son maître dans un trou, lieu du manque et de la mort. Aussi le maître le qualifie-t-il de serviteur mauvais et paresseux (v. 26) qui va  continuer à se comporter comme un esclave peureux, à s'enfermer en lui-même, avant d'être expulsé dans les ténèbres, où plutôt en s'expulsant lui-même. La sentence du verset 30 indique avec vigueur que l'inaction est sanctionnée. Ce jugement, il va sans dire, est prononcé au terme de la vie, mais il s'effectue tout autant, au long de l'existence humaine.

Les deux serviteurs bons et fidèles

     Quant aux deux autres serviteurs, ils reçoivent dix et cinq talents; il est dit que ces biens sont confiés à chacun selon ses capacités, ce qui sous-entend que le maître connaît bien les potentialités de chacun (v. 15). Ce geste posé se révèle d'une importance cruciale. Le maître distribue bel et bien des dons qui lui appartiennent et qui devront être mis en valeur; ce faisant, il exprime une totale confiance, capable de susciter la loyauté et le dévouement. Les deux appelés, oui, prennent un risque, mais, par ailleurs, une occasion leur est offerte d'être maître comme leur maître, tout en n'oubliant pas qu'ils sont des serviteurs. Les deux deviennent alors des gestionnaires actifs, autonomes. Responsables, et surtout ils entrent dans une relation de confiance et de réciprocité, ils s'ouvrent à l'autre. Le maître récompense leur engagement et les invite à entrer dans une joie surabondante : Celui qui a recevra encore, et il sera dans l’abondance (v. 29).

Le temps présent, le temps à venir

     Lorsque Jésus prononce cette parabole, ses auditeurs. -les disciples, les scribes, les responsables religieux, les pharisiens- apprennent que la reddition des comptes est imminente. La mort pointe à l'horizon. Il importe que les contemporains du prophète Jésus quittent une certaine mentalité religieuse d'une observance stricte, sans âme (5, 20); qu'ils secouent leurs léthargies et enlisements, leurs incompréhensions et aveuglements et qu'ils prennent position en faveur de l'Envoyé venu établir le règne de Dieu.

     Dans les premières décennies du christianisme, pour l'Église primitive qui attend de façon imminente la manifestation grandiose du retour du Christ, il faut tenir ferme dans la confiance et la persévérance, comme le mentionnent les premières épîtres pauliniennes. Quant à la communauté matthéenne, elle constate que la parousie tarde à venir, retard suggéré sobrement d'ailleurs, dans ce voyage du maître qui revient longtemps après (v. 19); il faut prévenir le découragement et la tiédeur et maintenir une vigilance soutenue dans l'engagement responsable.

     Pour les communautés chrétiennes d'aujourd'hui, vivant dans un milieu pluraliste soumises à une critique constante, souvent malveillante, il convient de saisir l'importance et l'urgence d'un engagement solide à l'égard du Seigneur, de sa Parole, de l'Église, peuple de Dieu que l'Esprit inspire et anime; sachons rester éveillés car la tentation guette toute vie et conduit au péché de la peur de Dieu, d'une méfiance qui engendre stérilité et mort.

Entre dans la joie de ton Maître et Sauveur

     En ce dimanche, nous sommes invités à clarifier nos perceptions de Dieu et à sonder nos intentions, à réfléchir à cet espace de liberté et de vérité dont nous bénéficions pour assumer nos responsabilités. Nous pouvons nous demander si, avec les capacités reçues, nous travaillons pour nous-mêmes ou pour le Seigneur, si nous sommes des fils de lumière, des fils du jour (l Thessaloniciens 5,5) comme nous le demande l'apôtre Paul. Le Seigneur, le Vivant, qui nous rassasie bien au-delà de nos attentes, qui nous assure une fécondité insoupçonnée et heureuse, nous promet de surcroît et tout gracieusement, une joie totale en Lui, pour sa plus grande gloire. Avec le psalmiste, en ce dimanche, nous pouvons chanter, goûter et savourer le Psaume 127 dans la traduction d'Alain Lerbret :

Heureux qui va au pas de Dieu
Sa main calleuse est ouvrière de la joie
Sa femme au cœur de la maison
l'attend comme une grappe de tendresse
Et ses fils à la table des jours l'entourent
Silence orant paix émue
Heureux qui aime
Au vent de Dieu.

 

Julienne Côté, CND

 

Source: Le Feuillet biblique, no 2421. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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