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1er dimanche de l'Avent B - 30 novembre 2014

 

Le retour attendu du Maître toujours présent

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Exhortation à la vigilance : Marc 13, 33-37
Autres lectures : Isaïe 63, 16b-17.19b; 64, 2b-7; Psaume 79(80); 1 Corinthiens 1, 3-9

 

Cet enseignement de Jésus, lorsqu’il est pris sans se souvenir de l’histoire du peuple de Dieu telle que conservée dans le Premier Testament et lorsqu’il est considéré sans tenir compte du contexte précis du chapitre 13 de l’Évangile de Marc, peut donner deux mauvaises impressions. Tout d’abord, celle que le Christ, tel ce maître de maison qui part en voyage, est absent de la vie des chrétiens et que, par conséquent, ces derniers sont en quelque sorte abandonnés à eux-mêmes et portent seuls l’exigeante responsabilité du bon fonctionnement de la maison. Il peut ensuite, et surtout, donner la fausse impression que le Christ absent cherche à surgir à n’importe quel moment dans le but de prendre les fautifs en défaut. Cet enseignement que Jésus donne à ses disciples ressemble alors à une sorte de mise à l’épreuve, à un avertissement empreint de danger, voire à une menace de prendre par surprise ceux qui ne sont pas sur un pied d’alerte permanent.

Un peuple abandonné ?

     Il importe de replacer tout d’abord cet enseignement de Jésus dans le contexte de l’histoire d’Israël. Au début du 6e siècle av. J.-C., la prise de Jérusalem par l’armée néo-babylonienne, la destruction du temple et l’exil à Babylone furent une terrible tragédie pour le peuple de Dieu. Comprenant ces événements comme le résultat de ses fautes, le peuple se sentit abandonné par Dieu. C’est ce que nous rappelle la première lecture, tirée du livre d’Isaïe : Yahvé, ne t’irrite pas à l’excès, ne garde pas à jamais le souvenir de la faute. Notre temple saint et magnifique, où nos ancêtres te louaient, est devenu la proie du feu. Tout ce que nous aimions est devenu ruine. Peux-tu rester insensible à tout cela, Yahvé? Te taire serait nous humilier à l’excès (Is 63,8a.1-11).

     Paradoxalement, cette douloureuse période fut, pour le peuple d’Israël, l’occasion d’une réflexion théologique sans précédent. En cette période de crise, Israël se questionna en effet sur l’histoire de sa relation avec Dieu et approfondit considérablement sa foi. De nombreux livres de l’Ancien Testament furent d’ailleurs rédigés ou largement retravaillés à cette époque. Et du cruel exil, du malheur de la ruine de Jérusalem et de l’horreur de la démolition du temple naquit une profonde espérance et une foi fervente, inattendue et renouvelée. Exilé loin de Jérusalem et éparpillé, le peuple d’Israël se rapprocha de son Dieu comme jamais auparavant. Et en ce sens, dans la dure absence présumée d’un Dieu désormais sans temple, celui-ci fut présent comme jamais auparavant au milieu de son peuple.

Les tribulations à venir

     C’est dans un contexte très similaire que se situe le chapitre 13 de l’Évangile de Marc et le récit de Jésus au sujet de ce maître de maison parti en voyage. Pendant quelques jours, Jésus avait fréquenté le deuxième temple de Jérusalem (celui de la période postexilique, construit pour remplacer le premier temple détruit par les Néo-babyloniens), enseignant et se confrontant aux vendeurs, aux scribes et aux Pharisiens (Mc 11-12). Puis, au moment de quitter définitivement le temple avec ses disciples, Jésus en annonce la destruction prochaine (Mc 13, 2). Tout le reste du chapitre 13 est consacré à l’explication que Jésus leur donne au sujet de cette période imminente et terrible qui entourera la destruction du second temple ainsi que sur les signes qui l’accompagneront. Il avertit d’abord ses disciples au sujet des tribulations et des souffrances à venir (Mc 13, 5-23). Mais il les rassure ensuite, annonçant la venue certaine et glorieuse du Fils de l’homme au terme de ces moments d’épreuves (Mc 13, 24-27). Puis il conclut en affirmant que, bien que ces événements soient certains et proches, le moment précis, lui, demeure inconnu (Mc 13,28-32). Le Christ cherche ainsi à fortifier son Église en vue de cette éprouvante période à venir. Tout comme le peuple d’Israël perdit son temple, mais ne fut jamais abandonné par Dieu, l’Église sera privée de la présence physique du Christ, mais est assurée de son retour en gloire.

Jamais seuls

     Si, dans l’enseignement de Jésus, le maître quitte la maison, il ne laisse pas pour autant ses serviteurs à eux-mêmes. En effet, il leur donne le pouvoir et des tâches précises (Mc 13, 34). Il ne part pas en laissant à ses serviteurs une totale liberté où chacun pourrait faire comme bon lui semblerait, courant ainsi le risque de déplaire au maître à son retour. Il leur donne au contraire des indications précises qui assureront le bon fonctionnement de la maison. Malgré son absence physique, le maître demeure ainsi présent à sa maisonnée. Pour l’Église, la présence du Christ, entre son départ et son retour en gloire, est assumée par l’Esprit. Plus tôt dans le même chapitre, Jésus fortifiait d’ailleurs ses disciples en disant : Et lorsqu’on vous amènera pour vous livrer, ne soyez pas d’avance en soucis de ce que vous devrez dire, mais ce qui vous sera donné à cette heure-là, dites-le; car ce n’est pas vous qui parlerez, mais l’Esprit, l’[Esprit] Saint (Mc 13, 11). Les croyants n’ont donc pas à s’inquiéter. Par le souffle de l’Esprit, ils ont l’assurance d’être soutenus et d’agir comme il le faut durant l’attente du retour imminent du Christ.

Le Maître est déjà en route

     Le retour de Dieu dans le Premier Testament est ardemment souhaité, car Il ne vient pas pour punir, mais pour sauver. Yahvé Dieu des Armées, fais-nous revenir, fais luire ta face et nous serons sauvés nous rappelle la deuxième lecture (Ps 80,20). C’est de la même manière que le retour du maître de maison est espéré dans le récit de Marc et que le retour en gloire du Christ est attendu dans l’Église. Ce n’est pas un événement à attendre dans la crainte, mais un moment à désirer avec ferveur et enthousiasme. Le moment à redouter est celui de la période de tribulation et non celui du retour du Christ. Heureusement, ce retour ne se situe pas dans un futur lointain; il est tout proche (Mc 13,29-30). Pour parler du retour du maître, Marc emploie d’ailleurs le verbe grec erkhomai (venir) conjugué à l’indicatif présent : Erkhétai (vient) : Veillez donc, car vous ne savez pas quand le maître de la maison vient. Le retour du Christ n’est donc pas un événement qui se déroule uniquement dans le futur, mais un mouvement déjà enclenché dans le présent. Le Christ est déjà en route vers son peuple et, par l’Esprit, il chemine toujours avec lui.

Soyez prêts!

     L’Église doit donc veiller, puisque cet événement heureux est assuré et ne saurait tarder. Le texte de Marc se fait d’ailleurs très insistant sur cette nécessité d’être prêt en employant le verbe agrupneô (être alerte, veiller) à 4 occasions en seulement 5 versets (Mc 13,33.34.35.37). Ne serait-il pas absurde en effet, qu’après cette dure période de tribulations, le Christ arrive en gloire, mais que son Église dorme! Mais plus encore, puisque le Christ, par le biais de l’Esprit, n’est jamais absent, ne serait-il pas navrant que son Église ne soit pas prête à le recevoir, non seulement à la fin des temps, mais à chaque moment menant à la parousie? À chaque instant, le Christ est là et se révèle à ceux qui le cherchent et qui sont ouverts à l’accueillir. Il se donne à découvrir à chaque moment, dans l’intimité de la prière, dans la beauté et la diversité de la nature, dans l’infiniment complexe relation à l’autre. Les occasions ne manquent pas et la personne qui est alerte, qui veille, qui est en éveil, se rend apte à la relation et adéquatement préparée pour recevoir le Christ à tout moment. Malgré les nombreuses tribulations que la vie peut nous réserver, nous avons l’assurance que le Christ vient. Comme le rappelle Paul aux Corinthiens, dans la deuxième lecture, le Christ est présent et affermit constamment son Église dans l’attente de son retour final dans la gloire (1 Co 1, 8).

Francis Daoust, bibliste

Source : Le Feuillet biblique, no 2423. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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