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4e dimanche de Carême B - 15 mars 2015

 

Faire œuvre de Dieu

Jésus et Nicodème, Crijn Hendricksz Volmarijn, 1601–1645

 

 

Le fils médiateur et le jugement : Jean 3, 14-21
Autres lectures : 2 Chroniques 36, 14-16.19-23; Psaume 136(137); Éphésiens 2, 4-10

 

L’évangile de ce dimanche relate la fin de l’entrevue de Nicodème lors de sa rencontre nocturne avec Jésus. Le fait de souligner que c’est de nuit qu’a eu lieu la visite du Pharisien (Jn 3, 1-2) va influer sur la suite du texte. Ajoutons que, sous la plume de Jean, nous retrouverons plus d’une fois le paradoxe ténèbres-lumière. Dans ce passage, Jésus annonce que le jugement attendu, lorsque viendra le jour de Yahvé, est en train de s’accomplir puisque le Fils est déjà au milieu de ce monde.

Le serpent de bronze

     Pour être sauvé il faudra regarder le Fils de l’homme élevé sur la croix, comme le firent nos pères au désert, et croire en sa qualité de Fils de Dieu. La comparaison avec le serpent de bronze est frappante : Ce dernier était fixé sur un étendard au milieu du désert (Nb 21, 9) alors que le Christ, lui, sera suspendu au bois de la Croix sur le Golgotha. Si le serpent guérissait ceux qui levaient les yeux vers lui, le Crucifié sera aussi instrument de salut pour le monde. Ces points de ressemblances ne viennent pas authentifier pour autant, de la part de Jésus ou de l’auteur, l’historicité de tous les détails concernant le serpent d’airain. La comparaison ne trouve son sens que dans la dimension religieuse des deux images.

Le don du Fils

     Le Fils n’a pas été envoyé pour juger le monde, ni pour le condamner mais pour le sauver : Celui qui croit en lui échappe au jugement (Jn 3, 18). Et l’inverse est aussi vrai : Celui qui ne veut pas croire est déjà jugé (v. 18). Il est ici question uniquement de croire ou de ne pas croire. En ce qui concerne le jugement, il ne dépend pas de Dieu mais de nos choix. L’offre de Dieu est sans équivoque. La réaction du monde, lorsque la lumière est venue, est cependant évidente : Les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière parce que leurs œuvres étaient mauvaises (v. 19).

L’accomplissement de la justice

     Jésus dira, sous la plume de son disciple bien-aimé, que celui qui agit selon la vérité, vient à la lumière (v. 21). Cet agir pourrait se traduire par l’accomplissement de la justice. Cet accomplissement commence d’abord en rendant à chacun et à chacune ce qui lui est dû. C’est là le minimum. Mais s’il faut poser des gestes qui peuvent être vérifiés par l’entourage, il faut aussi poser des gestes qui vont au-delà des consignes : Tu as travaillé tant d’heures, voici le salaire convenu. Mais parce que tu es dans le besoin, j’ajoute un supplément. Cette justice là, Dieu en est témoin car elle est dictée par la charité plus que par l’équité. Ce sont ceux-là qui viennent à la Lumière, c’est-à-dire au Christ, Lumière du monde. Agir au grand jour, n’avoir rien à cacher quand vient le temps de faire la lumière c’est collaborer à l’œuvre de Dieu.

L’affaire de Dieu et la nôtre

     Quand on parle de justice, dans les Écritures, il s’agit de celle de Dieu bien sûr, ce Dieu qui scrute le fond des cœurs et qui connaît les arcanes de l’âme humaine. Mais la justice est aussi l’affaire des humains, celle qui cherche à rétablir la vérité lorsque nous sommes les témoins privilégiés d’injustices. Faire la lumière est donc aussi notre devoir au risque de perdre des amitiés, d’être pris pour de faux jetons ou pour des traîtres. Il y a un enjeu important dans toute œuvre de justice. Sans la lumière et la vérité une société ne peut fonctionner d’une manière déterminante. La justice est un levier sociétal. Quand la justice se change en parti pris ou prend des allures de favoritisme c’est toute la société qui en souffre. Faire œuvre de justice c’est encore une fois, collaborer à l’œuvre de Dieu.

Les œuvres de ténèbres

     Que d’expressions renforcent l’idée que les œuvres mauvaises se font souvent dans l’obscurité : C’est une sombre histoire; quelle ténébreuse affaire; il passera de longues années à l’ombre… Ces formules évoquent toujours des mauvais coups, d’obscurs desseins. Pourquoi ? Parce que ceux et celles qui commettent le mal se dissimulent souvent, ils affectionnent les repaires secrets. En un mot, les lieux obscurs ont leur préférence. D’ailleurs les grands titres des journaux n’en finissent plus de nous le confirmer et souvent en première page. C’est particulièrement vrai aussi dans les films de gangstérisme. Les metteurs en scène ont un sens aigu du symbole car ils peuvent jouer avec les ombres.

Le mystère de la croix

     Lorsque Jean écrit que : De même que le serpent de bronze fut élevé par Moïse ainsi faut-il que le Fils de l’homme soit  élevé (v. 14). Nous comprenons qu’il parle du fait que le Christ fut élevé de terre pour être mis en croix. Mais il faut aussi comprendre qu’il a été par le fait même exalté. Tel est le mystère de la croix : l’abaissement devenant le levier de la glorification.

Les trois élévations de Jésus

     L’Écriture nous apprend que trois élévations ont marqué la vie de Jésus : d’abord celle dont il est question dans le texte johannique. Cette croix, élevée entre ciel et terre, prend une valeur symbolique : par sa dimension verticale, elle nous révèle la relation privilégiée de Jésus à son Père; et par sa dimension horizontale, elle nous révèle son amour universel pour le monde.

     Puis, Jésus a été relevé du tombeau où on l’avait déposé après avoir constaté sa mort par le coup de lance (Jn 19, 34). Le Père en le remettant debout nous présente un Jésus éternellement vainqueur de la mort : Vous cherchez Jésus de Nazareth le Crucifié? Il est ressuscité (Mc 16, 6). Enfin, le jour de son Ascension glorieuse, la foi nous apprend que le Christ vit désormais au-delà de l’espace et du temps. Jésus en s’élevant de terre est hors des limites de ce monde. Aussi, il attire l’humanité vers le haut : Et moi, une fois élevé de terre, j’attirerai tous les hommes à moi (Jn 12, 32). Entendons par là qu’il fait de l’homme et de la femme qui croient en Lui, des personnes déjà ressuscitées donc élevées en gloire : Le Père l’a ressuscité d’entre les morts et l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux (Ep 1, 20).

Les œuvres de lumière

     Les choix que je fais, les gestes que je pose, les paroles que je prononce m’introduisent ou dans la lumière ou dans les ténèbres. Ces choix créent des jeux de lumière ou de ténèbres qui auront des conséquences pour moi d’abord, souvent pour mon entourage et toujours pour la société dans laquelle j’évolue. La bonne nouvelle à l’intérieur de ces choix sera que les œuvres de lumière seront reconnues comme des œuvres de Dieu.

Un long travail intérieur

     L’évangile nous parle de deux catégories de personnes. Les unes  tendues entre le désir de vivre comme des êtres lumineux et les autres aux prises avec les ténèbres. Saint Paul l’a justement décrit lorsqu’il dit : Je ne fais pas le bien que je veux et commets le mal que je ne veux pas (Rm 7, 15). Comme lui nous aimerions avoir fait le choix de Dieu pour l’homme et la femme sauvés par son Fils. Hélas, il n’en est rien. Le jugement de Dieu sur nous s’accomplit par le long travail de la grâce en nous et par le douloureux cheminement vers la Lumière définitive.

 

Ghislaine Salvail, SJSH

 

Source : Le Feuillet biblique, no 2438. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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