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10e dimanche ordinaire C - 5 juin 2016
 

La miséricorde, c'est Lui!

 

Résurrection à Naïn, sculpture du Mont Sacré de Varallo.

Résurrection à Naïn, sculpture du Mont Sacré de Varallo.

 

 

Jésus ressuscite un jeune homme : Luc 7, 11-17
Autres lectures : 1 Rois 17, 17-24; Psaume 29(30); Galates 1, 11-19

 

Quand le pape François a proclamé l’Année jubilaire de la miséricorde, plusieurs personnes se sont demandé quel contenu pourrait entretenir l’intérêt du public pendant un an. En effet, nous limitons spontanément « miséricorde » à « pardon des fautes ». Cela restreint quelque peu la variété des propos! Par contre, la miséricorde mise en valeur par notre pape François comporte plusieurs étapes. En priorité, pour le pape, la « miséricorde, c’est l’acte ultime et suprême par lequel Dieu vient à notre rencontre. » (Le visage de la miséricorde, paragraphe 2). Il s’agit donc de prendre acte et de contempler l’initiative divine en faveur de l’humanité.

     C’est justement ce qui est mis en scène de multiples façons en ce dimanche de début d’été. Les lectures bibliques sont explicites.  Jésus dans l’évangile comme Élie dans la première lecture agissent en porte-parole de Dieu. Les témoins de leurs actions les reconnaissent comme tels. L’acclamation met en valeur de manière concentrée le contenu de l’évangile : Un grand prophète s’est levé parmi nous : Dieu a visité son peuple (d’après Luc 7, 16). Saint Paul déploie l’origine ultra-humaine de son message acquis par révélation. Le psaume suggère de répondre à cette lumineuse miséricorde qui illumine nos ténèbres : Que mon cœur ne se taise pas, qu’il soit en fête pour toi… (Psaume 29, 13).

Jésus, initiateur de la miséricorde
(Luc 7, 11-17)

     Le bref récit évangélique regroupe sept versets. Le miracle du relèvement du fils unique n’en occupe que deux. Et encore, le texte est avare de détails sur les procédures de Jésus! Tout se dénoue sur une simple phrase de Jésus. Visiblement, l’essentiel n’est pas là.

     Les trois premiers versets établissent avec précision le contexte.  Les disciples rencontrent une foule. Et cette foule «considérable» partage un moment dramatique de la vie d’une veuve : son fils unique est mort. Difficile pour nous de mesurer l’ampleur du drame. La vie n’a pas quitté un seul homme. Elle s’est retirée de toute une famille, car une veuve sans fils est condamnée à la misère…

     Jésus relève le fils qui reprend couleurs… et parole. Par la force de la parole de Jésus, une famille est donc revenue à la vie. Et cette parole fait beaucoup de chemin par la suite. Elle fait naître d’autres paroles positives. La rumeur respectueuse qui se répand dans le pays souligne l’initiative divine : Un grand prophète s’est levé parmi nous, et Dieu a visité son peuple (Luc 7, 16). Cette crainte publique, ce respect ne se limitent pas à Jésus : elle rend gloire à Dieu, source ultime d’un tel acte bienfaisant. 

     Cet extrait de l’Évangile selon saint Luc précise nos connaissances sur les miracles de la Bible. Bien des personnes s’attachent au côté spectaculaire et détonnant des faits miraculeux. Ici, on dirait que le récit lucanien très sobre dirige ailleurs les regards. Plus précisément, c’est l’identité de Jésus qui est mise en vedette, ainsi que l’origine divine de son agir miraculeux. Le geste miraculeux est le point de départ d’une prise de conscience, individuelle et collective, au sujet de Jésus. En cette Année jubilaire de la miséricorde, on pourrait ajouter que le miracle est un des langages de la miséricorde divine. Le miracle n’est pas le dernier mot de cette miséricorde, mais plutôt le premier mot d’un long écho qui se répercute d’âge en âge jusqu’à nous… et sans doute au-delà, si nous acceptons de prendre le relais.


Élie, prophète du positif (1 Rois 17, 17-24)

     Comme en écho à l’intervention miséricordieuse de Jésus décrite dans l’Évangile selon Luc, Élie le prophète pose un geste généreux qui reconstruit une famille. Ainsi, la lecture raconte un changement radical.  La logeuse d’Élie l’accuse vertement: Tu es venu chez moi pour rappeler mes fautes et faire mourir mon fils! (1 Rois 17, 18).  Comme si le travail du prophète consistait uniquement à dénoncer le péché et à punir les coupables…  Comme si le message des croyants devait se limiter à dénoncer et à pourfendre!

     Mais la supplication d’Élie auprès du Seigneur Dieu inverse les propos de la mère : … tu es un homme de Dieu… dans ta bouche, la Parole du Seigneur est véridique (1 Rois 17, 24).  Le geste miraculeux n’est pas une fin en soi.  Il sert à valider le rôle du prophète.  On retrouve une structure semblable dans l’évangile de ce dimanche.

     En cette Année de la miséricorde, cette aventure du prophète Élie peut nous inspirer un peu plus de transparence dans nos gestes de bonté.  Grâce à Dieu, nous pouvons, à notre tour, nous faire porteurs d’une parole constructive devant les situations les plus sombres.  Le psaume de ce jour évoque les revirements de situation qui traduisent les actions de Dieu : Seigneur, tu m’as fait remonter de l’abîme et revivre quand je descendais à la fosse (Psaume 29, 4); Tu as changé mon deuil en une danse… (Psaume 29, 12).

Paul, révélateur du Tout-Autre (Galates 1, 11-19)

     La parole divine constructive agit à long terme : Sa colère ne dure qu’un instant, sa bonté, toute la vie... (Psaume 29).  Cette action miséricordieuse permet d’émerger des pires bourbiers inventés par la méchanceté humaine. Saint Paul a justement été plongé dans de multiples tensions à cause de la transmission de la Parole.

     Mais aujourd’hui, Paul concentre notre attention sur la source de ses propos. Paul décrit avec précision cette origine divine de ses communications répétées dans le bassin méditerranéen : … l’Évangile que j’ai proclamé n’est pas une invention humaine (Galates 1, 11); cet Évangile vient par révélation de Jésus Christ (Galates 1, 12).

     Paul n’est donc pas l’inventeur (génial!) du christianisme, comme le prétendent certains auteurs à la mode. Je pense ici à Emmanuel Carrère dans Le Royaume. Saint Paul s’en défend clairement. La foi au Ressuscité n’est pas transmise initialement par un homme, mais par la révélation du Choisi de Dieu, Jésus Fils de Dieu. Il y a dans cette révélation quelque chose qui dépasse tout ce que l’être humain peut imaginer.

Aujourd’hui, la miséricorde

     En cette Année jubilaire de la miséricorde, puisse notre parole faire connaître les moments extraordinaires où Dieu vient à notre rencontre. Au cœur de nos existences si ordinaires, l’initiative de Dieu jette une lumière bienfaisante sur les jours les plus sombres!  Le monde est enténébré par des porte-parole divins autodéclarés, des messagers de haine et de mort.  Puisse notre parole toute centrée sur les initiatives de Dieu contrer leurs justifications du meurtre et de l’écrasement des différences!


Par miséricorde, Dieu est venu à la rencontre de l’humanité. Saurons-nous garder ouverts les multiples canaux de communication qu’il a voulu établir avec nous? Puissent Élie, Paul et Jésus nous inspirer dans cette tâche essentielle de donner corps à la miséricorde divine, ici et maintenant.  Puissent nos actions faciliter la rencontre avec Dieu, puisqu’il prend encore l’initiative de se dire et de partir à notre rencontre jusque dans les périphéries de nos vies!

 

Alain Faucher, ptre

 

Source : Le Feuillet biblique, no 2493. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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Le Seigneur Jésus Christ, Pain de notre vie