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28e dimanche ordinaire C - 9 octobre 2016
 

Il n'y a que cet étranger!

James Tissot - La Guérison de dix lépreux - Brooklyn Museum

La Guérison de dix lépreux par James Tissot , Musée Brooklyn Museum.

 

 

Guérison de 10 lépreux : Luc 17, 11-19
Autres lectures : 2 Rois 5, 14-17; Psaume 97(98); 2 Timothée 2, 8-13

 

Pour l'évangéliste Luc, c'est dans la ville sainte de Jérusalem que doit s'opérer le salut.  Lorsqu'il présente la Transfiguration de Jésus, il signale que Moïse et Élie parlaient de son départ qu'il allait accomplir à Jérusalem (Lc 9, 31). Dans l'épisode où Hérode est présenté comme un renard qui veut perdre Jésus, on trouve la déclaration de ce dernier : Mais aujourd'hui, demain et le jour suivant, je dois poursuivre ma route, car il ne convient pas qu'un  prophète meure hors de Jérusalem (Lc 13, 33). Dans la troisième annonce de sa passion, Jésus dira : Voici que nous montons à Jérusalem et que s'accomplira tout ce qui a été écrit par les prophètes au sujet du fils de l'homme (Lc 18, 31). Dans son introduction à la parabole des mines, on trouve l'explication : On pensait que le Royaume de Dieu allait apparaître à l'instant même, parce qu'il était près de Jérusalem (Lc 19, 11).

     Jérusalem, lieu du salut, lieu où culmine la mission de Jésus, mais aussi lieu vers lequel la mission de Jésus chemine de Lc 9, 51 à Lc 18, 14, lieu vers lequel il monte : Comme s'accomplissait le temps où il devait être enlevé, il prit résolument le chemin de Jérusalem (Lc 9, 51). Un peu plus loin, Luc rappelle cette montée : Il cheminait par villes et villages, enseignant et faisant route vers Jérusalem (Lc 13, 22). On n'est donc pas étonné que notre récit des dix lépreux s'ouvre par la note : Il advint comme il faisait route vers Jérusalem qu'il passa aux confins de la Samarie et de la Galilée (Lc 17, 11). Le récit lui-même semble pensé à partir de Jérusalem puisque la Samarie est nommée avant la Galilée.

Un appel à la confiance

     Dix lépreux viennent donc à la rencontre de Jésus et s'arrêtent à distance. Pourquoi?  Sans doute en raison du mal dont ils sont atteints, car, selon les règles relatives au pur et à l'impur, le lépreux atteint de ce mal portera des vêtements déchirés et ses cheveux dénoués. Il se couvrira la moustache et il criera : Impur! Impur! Tant que durera son mal, il sera impur et, étant impur, il demeurera à part: sa demeure sera hors du camp (Lv 13, 45s).

     Nos dix lépreux crient : Jésus, maître, prends pitié de nous!, utilisant le terme « maître » comme feraient des disciples. Au cours du ministère de Jésus en Galilée, Luc avait déjà présenté la guérison d'un lépreux (Lc 5, 12-16) et ce lépreux avait demandé sa guérison : Seigneur, si tu le veux, tu peux me purifier. Les dix lépreux, eux, disent simplement : Jésus, maître, prends pitié de nous. Le lépreux de Galilée est immédiatement exaucé par Jésus qui lui dit, en étendant la main et en le touchant : Je le veux, sois purifié.  Et, aussitôt, nous dit Luc, la lèpre le quitta. Ce n'est qu'après la guérison que Jésus commande à l'homme purifié de ne parler à personne de ce qui vient de se passer, d'aller se montrer au prêtre et d'offrir pour sa purification ce qu'a prescrit Moïse. 

     Le groupe des dix lépreux, lui, reçoit comme réponse à sa prière d'aller se montrer au prêtre. C'est chemin faisant, alors qu’ils vont s'acquitter de ce que Jésus ordonne, en manifestant ainsi à l'avance une confiance dans la puissance guérissante de Jésus, que les dix sont purifiés.

Un acte de reconnaissance et d’adoration

     Mais ce récit comporte une surprise, une double surprise : un seul des dix, se voyant purifié en route, revient sur ses pas, glorifie Dieu à haute voix, tombe sur la face aux pieds de Jésus et remercie. La surprise des surprises tient dans les mots qui suivent : Et c'était un Samaritain.  Le texte décrit l'agir de celui qui revient sur ses pas dès qu'il prend conscience de sa guérison: il tombe sur la face aux pieds de Jésus. Le lépreux de Galilée, lui, était tombé sur la face en voyant Jésus, alors qu'il demandait sa guérison (Lc 5, 12).  Le lépreux qui se signale dans le groupe des dix glorifie Dieu à haute voix et remercie comme nous faisons au début de chaque prière eucharistique : « Vraiment il est juste et bon de te rendre gloire, de t'offrir notre action de grâce, toujours et en tout lieu. »  Reconnaissons que les dix lépreux ont exprimé leur confiance en la parole de Jésus puisque, avant même d'expérimenter leur guérison, ils ont obéi à l'ordre d'aller se montrer aux prêtres. Mais, le lépreux reconnaissant, lui, va plus loin dans sa relation à Jésus. Il reconnaît, derrière le don, le donateur, la grandeur de ce donateur. Pour lui, l'événement ne se termine pas avec ce splendide cadeau de la guérison, mais avec la reconnaissance, la gratitude envers l'auteur du don. N'est-ce pas ce que les psaumes d'action de grâce nous enjoignent de faire, faisant de la gratitude un pas vers la louange de Dieu?

     La personne qui a poussé tellement plus loin que les neuf autres sa relation avec son guérisseur est un Samaritain, avons-nous noté. Un Samaritain, c'est-à-dire quelqu'un qui reconnaît comme Écriture fondatrice le seul Pentateuque, quelqu'un qui entend, par cette foi traditionaliste, préserver la religion des origines en demeurant fidèle à la loi de Moïse, à la circoncision et en observant rigoureusement le Sabbat. C'est sur le mont Garizim qu'ils rendent un culte. Ils ont refusé la foi en la résurrection des morts jusqu'au 4e siècle. Pour un juif, un Samaritain est considéré comme un hérétique. Le lépreux qui est revenue sur ses pas n'a pas vu simplement en Jésus une personne lui permettant de retrouver une vie normale, mais bien quelqu'un qui l'a conduit à Dieu, pour lui rendre gloire, quelqu'un à qui il fait place dans sa vie, avec qui il entre dans une relation de profonde gratitude.

     Le texte de Luc culmine avec la réaction de Jésus : Est-ce que tous les dix n'ont pas été purifiés? Et les neuf autres, où sont-ils?  On ne les a pas vus revenir pour rendre gloire à Dieu; il n'y a que cet étranger… Et Jésus va révéler à cet homme qu'il n'est pas simplement guéri physiquement, mais sauvé en raison de sa foi en Jésus. C'est si souvent à nous que Jésus pourrait poser la question : n'as-tu pas été éclairé, consolé, guéri, réconforté? Où es-tu? Où en es-tu dans ta foi en Jésus?  Avec notre pape François et, avant lui, avec notre pape émérite Benoît, es-tu chaque jour plus conscient qu'« à l'origine du fait d'être chrétien, il n'y a pas une décision éthique ou une grande idée, mais la rencontre avec un événement, avec une Personne qui donne à la vie un nouvel horizon et par là son orientation décisive » (EG 7).

     Luc avait attribué, au tout début de son ministère en Galilée, la déclaration qu'il y avait beaucoup de lépreux en Israël au temps du prophète Élisée; et aucun d'eux ne fut purifié, mais bien Naaman, le Syrien (Lc 4, 27). C'est le récit de cette guérison de Naaman qui nous est proposé en première lecture. Comme le Samaritain de Lc 17, Naaman est un étranger. Il a d'abord opposé une résistance à accueillir les consignes du prophète Élisée; puis, il a fait confiance à l'envoyé de Dieu et fut guéri aussitôt.

     Jésus assure le lépreux reconnaissant que sa foi le sauve. Paul, lui, presse Timothée de se souvenir de la résurrection de Jésus.  Il pourra alors supporter ses souffrances pour que  les choisis de Dieu obtiennent aussi le salut de Dieu, la vie éternelle.

 

Lorraine Caza, CND

 

Source : Le Feuillet biblique, no 2502. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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