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Ascension du Seigneur A - 28 mai 2017
 

Le jour de son admirable Ascension

Vitrail de la cathédrale Notre-Dame-des-Anges de Los Angeles.

Vitrail de la cathédrale Notre-Dame-des-Anges de Los Angeles

 

 

L'envoi en misison : Matthieu 28, 16-20
Autres lectures : Actes 1, 1-11; Psaume 46(47); Éphésiens 1, 17-23

 

En 1643, circulait en France un document impressionnant destiné aux personnes qui s'intéressaient à l'établissement d'une colonie à Montréal.  Le titre du texte : « Les Véritables Motifs des Messieurs et Dames de la Société de Notre-Dame de Montréal. Pour la conversion des Sauvages de la Nouvelle France ».

Le projet missionnaire de Ville-Marie

     Pour encourager les bienfaiteurs et bienfaitrices à  donner leur support au projet, l'auteur que l'on croit être Jean-Jacques Olier, le fondateur de la Compagnie de Saint-Sulpice, présentait  quatre motifs de participer à cette entreprise missionnaire et mentionnait neuf objections souvent énoncées dans la France d'alors, en leur apportant  réponse. Dans le développement du premier des quatre motifs présentés, qui est d'une profondeur théologique  impressionnante, on peut lire ceci : «Puisque c'est le dessein de Dieu d'appeler au salut tous les hommes… et qu'à cet effet, il a laissé une Église au monde… qui, suivant le commandement qui lui en a été fait en la personne de ses premiers disciples et apôtres, d'enseigner l'Évangile sans distinction à toute créature raisonnable… le temps viendrait où Dieu serait adoré par tout le monde, et que depuis le plus petit jusqu'au plus grand, chacun aurait la connaissance de son Nom…; ce que notre Seigneur, le jour de son admirable Ascension recommanda particulièrement à ses disciples par la dernière de ses paroles, et scella cette recommandation de sa sainte bénédiction qu'il voulut étendre à toutes les missions de l'Église, jusqu'à la fin du monde…».

La montagne du Seigneur

     C'est cette dernière parole de Jésus « le jour de son admirable Ascension » qui nous est proposée dans notre liturgie d'aujourd'hui. La finale de l'Évangile de Matthieu souvent considérée  comme  la clef d'interprétation de tout cet écrit, commence avec cette référence aux onze disciples, et donc avec une évocation discrète de celui qui s'est coupé du groupe, Judas. Puisqu'il est question d'un lieu en Galilée, c'est donc que les disciples ont obéi à la consigne que le Christ avait confiée à Marie Madeleine et à l'autre Marie pour eux: elles devaient dire aux Onze de se rendre en Galilée, là où ils le verraient. Un autre détail ne saurait nous échapper : c'est à la montagne que Jésus leur avait donné rendez-vous. Pour Matthieu, il semble bien que la montagne n'est pas qu'un élément géographique.  N'y a-t-il pas eu la montagne de la Transfiguration où Moïse et Élie sont venus converser avec Jésus et où la voix venue de la nuée a révélé l'identité  de Jésus (Mt 17, 1-9)? Et que dire de la montagne du sermon où Jésus donne la loi nouvelle, tellement plus radicale que la loi du Sinaï (Mt 5-7). Et l'on garde en mémoire, bien sûr, la montagne où le diable montrait à Jésus tous les royaumes de la terre (Mt 4, 8-10), mais aussi, la montagne que Jésus gravit pour aller prier à l'écart, après avoir renvoyé les foules, témoins de la multiplication des pains (Mt 14, 23). À la vue de Jésus, nous dit l'évangéliste, les disciples se sont prosternés devant lui. On pense alors à deux autres prosternements dans cet évangile : celui des pêcheurs dans la barque après que Jésus eut calmé le vent et les vagues (Mt 14,13); celui des mages au tout début de cet évangile (Mt 2, 11). Est-ce pour rappeler que notre Église est Église de pécheurs  que le texte comporte aussi  une évocation  du doute de certains ? C'est dans « un tel contexte que le Christ ressuscité prend la parole ». Claude Tassin a habilement observé que la déclaration du Ressuscité adopte le schéma fondamental des décrets royaux: J'ai reçu tel pouvoir; Donc, j'ordonne que…

Le  pouvoir de Jésus

     À la fin du dernier livre de l'A.T. consacré à l'histoire du peuple d'Israël, 2 Chroniques, le dernier verset rapporte le décret où Cyrus, roi de Perse, annonce ce que Dieu lui demande de faire pour lui, Dieu, et pour son peuple. Du verset qui clôt les livres de l'histoire d'Israël dans le premier testament, nous voici aux versets qui terminent le témoignage matthéen sur la vie et la mission de Jésus  et qui évoquent aussi le pouvoir de Jésus et  ses consignes aux Onze. Et que dire des débuts : il est intéressant de noter que Gn 1, 1 s'ouvre avec les mots : Au commencement et que Mt 1, 1 est introduit par les mots : Livre de la genèse de Jésus Christ.

     Lorsque le Christ ressuscité s'approche des disciples, il affirme donc son pouvoir : Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur la terre (Mt 28, 18) et l'on est renvoyé à la scène des tentations de Jésus au désert, au début de son ministère, alors que le diable emmenait Jésus « sur une très haute montagne, lui montrant tous les royaumes du monde et leur gloire » et lui promettait : Tout cela, je te le donnerai si, tombant à mes pieds, tu te prosternes devant moi. Et l'on connaît le refus de Jésus à cette proposition (Mt 4, 8-10). Quel contraste entre ce refus et l'affirmation d'un pouvoir absolu.

La mission

Puis, c'est l'envoi en mission : Allez, une mission articulée en trois points :

  1. Le disciple est appelé à faire de toutes les nations des disciples. Quel chemin depuis le Ne prenez pas le chemin qui mène vers les nations païennes et n'entrez dans aucune ville des Samaritains. Allez plutôt vers les brebis perdues de la maison d'Israël (Mt 10, 5s).
  2. Le disciple est appelé non pas à circoncire, non pas à donner le baptême de Jean Baptiste, mais à baptiser au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Cette formulation trinitaire du rite baptismal nous laisse deviner qu'un certain laps de temps s'est écoulé depuis les premiers baptêmes chrétiens faits au nom de Jésus.
  3. Une troisième responsabilité est donnée à qui évangélise : Apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Il ne s'agira pas d'assurer l'observance des 613 commandements de la loi juive, mais bien d'enseigner la loi de l'amour de Dieu par-dessus toute chose et de l'amour du prochain comme Jésus nous a aimés.

     Puis vient l'ineffable promesse qui est en quelque sorte, le point- sommet de cet évangile : Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin du monde. Le Dieu-avec-nous, n'est-ce pas le Dieu qu'Is 7, 14 avait annoncé et que l'ange du Seigneur a rappelé à Joseph dans l'annonce qu’il reçut de la naissance de Jésus en Mt 1, 23?

     Et si nous lisions le passage d'Ep 1, 17-23 comme un très riche commentaire du «Tout pouvoir m'a été donné au ciel et sur la terre»?  Le Père, nous dit l'auteur de la lettre, a établi le Christ au-dessus de tout être céleste : Principauté, Souveraineté, Puissance et Domination, au-dessus de tout nom que l'on puisse nommer, non seulement dans le monde présent mais aussi dans le monde à venir. Il a tout mis sous ses pieds...

     Et si nous écoutions Ac 1, 8 comme un merveilleux écho de Mt 28, 19? Le Ressuscité  répond  aux apôtres réunis : Mais vous allez recevoir  une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'aux extrémités de la terre.


Lorraine Caza, CND

 

Source : Le Feuillet biblique, no 2535. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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