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26e dimanche ordinaire A - 1er octobre 2017
 

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Le travail de la vigne

Lectionnaire des Évangiles pour l’empereur Henri III, folio 21
Abbaye d’Echternach, circa 1039-1040

Parabole des deux fils: Matthieu 21, 28-32
Autres lectures : Ézékiel 18, 25-28 ; Psaume 24 (25) ; Philippiens 2, 1-11
Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.

La parabole

Jésus était un prédicateur hors pair. Il avait compris qu’il faut amener progressivement ses interlocuteurs à une prise de conscience. La parabole est un instrument parfait pour entreprendre cette démarche pédagogique. Au lieu d’énoncer brutalement son enseignement, il raconte une histoire fictive dont il tait la conclusion. Il interroge son auditoire qui découvre des propos qui la concernent en répondant à la question du Sauveur. Jésus a aussi saisi que s’il attaquait directement les gens, il aurait empêché toute communication. Le public se serait défendu intérieurement devant une agression verbale. En utilisant une fiction, le Maître transmet subtilement son message et ne hérisse pas la foule immédiatement.

Un ajout tardif

Selon certains spécialistes de l’Écriture sainte, le dernier verset de la parabole qui restreint les destinataires du discours serait une addition tardive : Car Jean Baptiste est venu à vous, vivant selon la justice, et vous n’avez pas cru à sa parole ; tandis que les publicains et les prostituées y ont cru. Mais vous, même après avoir vu cela, vous ne vous êtes pas repentis pour croire à sa parole (v. 32). Jésus aurait eu plutôt, à l’origine, l’intention de parler de l’engagement chrétien à un large auditoire. Le rédacteur de l’Évangile, en ajoutant ce verset, transforme l’épisode en une adresse dirigée vers l'élite religieuse judaïque qui n’acceptait pas la Nouvelle Alliance inaugurée par le Christ. Même si ce n'est plus la pointe de l’Évangile, l’exhortation à l’engagement demeure un élément central de l'instruction livrée par le Seigneur.

Les éléments symboliques

Jésus utilise constamment un langage codé dans ses paraboles. Il faut déchiffrer les symboles pour bien la comprendre. Dans l’histoire, le deuxième fils répond : «  Oui, Seigneur!  » Ce nom est, pour les Israélites, celui que Dieu a révélé à Moïse (YHWH). Jésus associe donc le père de la parabole à Dieu. La vigne est un symbole souvent utilisé par Jésus pour désigner le monde et plus particulièrement, l’Église, la présence visible du Christ invisible dans notre univers. Et enfin, les deux fils représenteraient l’humanité. Avec l’ajout de Matthieu, ils représentent les fils et filles de l’Ancienne Alliance qui acceptent ou refusent Jésus.

La conversion

La conversion constitue la clef de ce récit. Jésus affirme que l’être humain peut décider de changer. Il n’est pas prisonnier des fautes commises par ses ancêtres. Le prophète Ézéchiel, dans la première lecture (18,25-28), évoque cette doctrine à une époque où l’idée de la conversion n’était pas encore fixée. Dieu a transmis par l'intermédiaire de ce prophète une vision tournée vers le futur.

En évoquant la possibilité du repentir, Jésus indique aussi que l’être humain n’est pas prisonnier d’une destinée fixée d’avance par son Créateur. Déjà dans le passé, certains penseurs chrétiens ont, malgré tout, construit une doctrine qui a cette prémisse : la prédestination. Le catholicisme a rejeté cette doctrine. Il est aussi utile de remarquer que Jésus ne fournit pas de référence temporelle dans cette parabole. L’auditoire ne sait pas quand le premier fils a changé d’idée. Cette omission est cohérente avec d’autres paraboles de Jésus. Le récit des ouvriers de la dernière heure indique que la conversion peut se faire en tout temps. Un dictateur sanguinaire qui se convertit sur son lit de mort recevra le même salaire qu’un ouvrier qui a toujours œuvré à l’édification du Royaume sur la terre.

Dans une perspective humaine, ce point de vue est injuste. Un ouvrier mérite le salaire correspondant aux heures qu’il a travaillées. La vision divine est différente. Dieu aime tous ses enfants même ceux et celles qui se réconcilient tardivement avec lui. En plus, le salaire donné par le Père ne se mesure pas. Il est infini. Devant ce fait, la personne devrait se concentrer sur son chemin spirituel personnel plutôt que de regarder les autres et d’adresser des réprimandes à Dieu.

L’engagement

Dans la version sans ajout de la parabole, Jésus transmettrait une instruction sur l’engagement chrétien. Jésus souhaite des disciples qui ont la foi, qui ont dit « oui » à la Bonne Nouvelle et qui agissent en transformant le monde pour qu'il devienne la vigne du Père. L’engagement ne se vérifie pas seulement dans les affirmations verbales des ouvriers et des ouvrières. Ils doivent agir pour prouver l’authenticité de leur adhésion. La foi reste importante, car le Seigneur ne veut pas seulement des bénévoles, qui par unique souci humanitaire, tente de soulager la misère du prochain. Il veut des fils et des filles du Père qui, par l’action de l’Esprit, vont permettre à l'humanité de se dépasser pour participer pleinement au projet divin.

Le Règne de Dieu

La seconde lecture (Philippiens 2,1-11) de la liturgie de ce dimanche décrit les qualités recherchées par le Père pour ses ouvriers. Paul montre dans la deuxième partie de cet extrait que le Christ incarne à la perfection ces caractéristiques. Il décrit indirectement le monde où Dieu règne. C’est un univers où l’amour du prochain a priorité. Cet amour s’exprime dans la tendresse et dans la compassion. Jésus a manifesté cet amour dénué de tout égoïsme lorsqu’il a accepté d’être crucifié pour enclencher le processus du salut. C’est aussi un environnement où l’humilité est une valeur cruciale. L’orgueil, la vanité n’ont pas leur place dans ce monde. Le salut chrétien est un don divin et aucun être humain ne peut s’enorgueillir de le mériter. Jésus, l’homme-Dieu, a fait preuve d’humilité en n’exigeant pas de l’humanité gloire et honneurs comme les dieux païens ou comme l’empereur romain qui était déifié à l’époque du Christ. En plus, l’humilité du Christ s’est manifestée de la manière la plus extrême au moment de sa mort. Nu devant la foule, il a été crucifié, le supplice le plus honteux dans la panoplie des tortures romaines. Enfin, tous les disciples du Ressuscité doivent se grouper autour de Lui, car il est l’unique Rédempteur. Les intrigues de palais pour se tailler une place prestigieuse ou le fait de manifester sa supériorité n’ont pas leur place dans le monde nouveau de Dieu inauguré par le Christ. Chacun doit se considérer comme le serviteur de l’autre et agir pour préserver l’unité de l’ensemble.

Benoît Lambert

Source : Le Feuillet biblique, no 2544. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Diocèse de Montréal.

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