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Dimanche de la Pentecôte A - 4 juin 2017
 

À quel moment ont-ils reçu l'Esprit Saint?

Fresque de la Pentecôte par Giotto di Bondone

 

 

Jésus apparaît à ses disciples : Jean 20, 19-23
Autres lectures : Actes 2, 1-11; Psaume 103(104); Galates 5, 16-25

 

Vous savez sans doute que le récit des Actes des Apôtres raconte que la venue de l’Esprit saint a lieu lors de la Pentecôte, soit cinquante jours après Pâques. Mais, avez-vous déjà pris conscience que l’Évangile de Jean propose une chronologie différente? Lire ces deux textes lors d’une même célébration soulève cette question : À quel moment ont-ils reçu l’Esprit Saint? Je vous propose de « remettre les pendules à l’heure » pour voir comment comprendre cette différence.

Le soir même de la résurrection

     L’Évangile selon Jean est celui qui a le plus de récits d’apparition du Christ ressuscité. Après la rencontre entre Marie de Magdala et le Ressuscité (Jn 20,11-18) cet évangile propose un récit de l’apparition du Ressuscité aux disciples. Le don de l’Esprit est situé au sein de ce récit d’apparition proposé par la liturgie de la Pentecôte (Jn 20,19-23). Dès le premier verset, le cadre temporel est mis en place : Le soir de ce même jour qui était le premier de la semaine (Jn 20,19). Ce jour est déjà connu des lecteurs de Jean puisque le chapitre 20 s’ouvre par une indication similaire : Le premier jour de la semaine, à l’aube, alors qu’il faisait encore sombre, Marie de Magdala se rend au tombeau.

Le jour du Seigneur

     Aujourd’hui, le lundi est considéré comme le premier jour (et le jour le plus difficile pour certains...) de la semaine. Pour les premiers chrétiens, le premier jour de la semaine désignait le dimanche, le jour suivant le sabbat (samedi). Les divers récits bibliques sont clairs à ce sujet. La résurrection de Jésus est reliée au dimanche. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle les chrétiens se rassemblent encore les dimanches pour célébrer le jour du Seigneur.

     Chez Jean, ce jour de la résurrection est assez occupé. Il commence avec la course entre Pierre et le disciple bien-aimé au tombeau vide (20,1-10). Il se poursuit avec l’apparition à Marie de Magdala (20,11-18). Puis, il se termine avec l’apparition aux disciples (20,19-23).

     C’est au cœur de cette rencontre, le jour de Pâques, que les disciples reçoivent l’Esprit Saint. La façon dont cet événement est raconté nous aide à comprendre les mots grecs traduits par « Esprit Saint ». En effet, Jésus souffle sur ses disciples pour qu’ils reçoivent le pneuma agion, le souffle/Esprit saint. Cette action rappelle celle de Dieu dans la Genèse qui donne la vie à l’humain par son souffle (Gn 2,7). Il s’agit en quelque sorte d’une nouvelle création. Le Ressuscité donne la vie par son souffle.

     L’Évangile selon Jean avait bien préparé cette scène. À quelques reprises, Jésus avait annoncé qu’après son départ, les disciples recevraient ce souffle qui est parfois surnommé Paraclet. Lorsque viendra le Paraclet que je vous enverrai d’auprès le Père, le souffle/l’esprit de vérité qui procède du Père, il rendra témoignage de moi; et à votre tour, vous me rendrez témoignage...  (Jn 15, 25-27). On voit qu’en Jean, l’Esprit Saint est relié à la vérité et au témoignage.

Le don de l’Esprit selon les Actes

     Les Actes des Apôtres présentent une temporalité différente. Dans le cadre de ce récit, c’est 50 jours après la résurrection qu’à lieu la Pentecôte. Tout comme en Jean, les disciples sont ensemble, rassemblés à l’intérieur d’une maison. Par contre, il y a plusieurs éléments différents du récit de Jean. Premièrement, le Ressuscité n’est pas présent physiquement. Pourtant, c’est le Ressuscité qui unit ces disciples. Deuxièmement, le souffle de Jésus devient celui d’un violent coup de vent. Ce coup de vent est si fort qu’il produit un bruit venant du ciel. Troisièmement, les Actes utilisent une image symbolique forte pour évoquer le don de l’Esprit : des langues de feu. Notons que le texte précise que ce n’est qu’une image. L’expérience décrite est « comme » l’apparition de langues de feu. Ce symbole de langues de feu évoque déjà la fin du récit où les disciples se mettent à parler dans toutes les langues aux pèlerins venus à Jérusalem. En cela, il y a une parenté avec le concept du don de l’Esprit chez Jean. Jean transmet que l’Esprit est relié au témoignage, les Actes montrent les disciples en train de témoigner dès qu’ils reçoivent ce don.

Pourquoi 50 jours plus tard?

     La venue de l’Esprit selon les Actes des Apôtres a lieu après une période de cinquante jours soit entre Pâques et la Pentecôte pour quelques raisons. D’abord, la venue de l’Esprit est reliée à l’absence physique de Jésus. Pour les Actes, l’Esprit ne peut venir que lorsque le Christ ne sera plus là. Les Actes transmettent une période de 40 jours avant l’ascension de Jésus. Ce chiffre n’est pas dû au hasard. Dans la Bible 40 jours ou 40 ans, c’est le temps de maturation et de préparation. On peut penser aux 40 ans dans le désert du peuple hébreu ou aux 40 jours dans le désert de Jésus avant le début de son ministère. Ce laps de temps permet un temps où le Ressuscité est présent avec ses disciples. Pendant ce temps, il s’était fait voir d’eux et les avait entretenus du Règne de Dieu (Ac 1,3).  

     Le récit du don de l’Esprit est raconté lors de la Pentecôte, une fête qui se déroulait 50 jours après Pâques et qui rassemblait à Jérusalem des pèlerins juifs venant d’un peu partout. C’est donc le moment tout désigné pour raconter comment le don de l’Esprit a permis aux disciples de témoigner dans toutes les langues.

Alors, à quel moment ont-ils reçu l’Esprit Saint?

     La tradition chrétienne a retenu deux récits très différents au sujet de la venue de l’Esprit. Les divergences entre ces récits nous permettent de comprendre le type de texte que nous avons entre les mains. Puisqu’il est impossible de fusionner ces deux traditions, il faut se rendre compte que ce sont des relectures théologiques et non le verbatim d’un événement. L’Évangile selon Jean et les Actes des Apôtres nous invitent à réfléchir sur le nouveau mode de présence du Christ ressuscité : malgré son absence physique, il est présent par son souffle, par son esprit. Cette affirmation ne va pas de soi. C’est pour cela que les deux textes nous présentent des catéchèses pour nous aider à comprendre cette nouvelle forme de présence du Christ dans sa communauté.

     Pour répondre directement à la question, le don de l’Esprit a eu lieu lors du jour de la résurrection, 50 jours plus tard et même aujourd’hui. La date de ce don est sans importance puisque ce mode de présence se poursuit encore. Le récit de l’Évangile de Jean relie ce don de l’Esprit à la paix (vv. 19 et 21), au pardon des péchés (v. 23) et à l’envoi en mission des disciples (v. 21). Les Actes des Apôtres insistent sur l’annonce des merveilles de Dieu partout et dans toutes les langues (v. 11). Au fond, les deux textes traitent de ce qui est au cœur de l’expérience chrétienne : faire une expérience si forte du Ressuscité qu’elle nous pousse à en témoigner. Le moment du don de l’Esprit, c’est donc aujourd’hui.

Sébastien Doane

Source : Le Feuillet biblique, no 2536. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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Le jour de son admirable Ascension