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Sainte-Marie, Mère de Dieu - 1er janvier 2017
 

Bénis, adoptés, à l'écoute

Adoration des bergers par Gerard van Honthorst, 1622.

Adoration des bergers par Gerard van Honthorst, 1622.

 

 

Les bergers rendent visite à Jésus : Luc 2, 16-21
Autres lectures : Nombres 6, 22-27; Psaume 66(67); Galates 4, 4-7

 


Étonnant, ce dimanche placé en tête de l’année nouvelle! On peut estimer que la Journée mondiale de prière pour la paix ne nous concerne qu’au moment où nous écoutons les nouvelles du monde.  On peut juger que la thématique théologique de Sainte Marie, mère de Dieu passe bien haut au-dessus de nos préoccupations spirituelles… Le menu biblique ramène les choses à notre niveau. Nous sommes bénis, nous sommes adoptés par Dieu, nous trouvons un modèle en Marie, première disciple… Autant de pistes bibliques bien concrètes qui font de ce dimanche inaugural un grand moment d’actualisation, ouvert sur l’avenir.

     L’an nouveau 2017 s’ouvre… avec un dimanche. Ce fait est déjà une invitation pour les disciples de Jésus à se centrer sur l’essentiel de leur relation avec Dieu et avec Jésus. Commencer une année en célébrant le jour hebdomadaire de la Résurrection, c’est prendre conscience des transformations déjà accomplies dans notre vie et dans notre monde par la grâce de Dieu. Le menu biblique prévu pour la solennité de Sainte Marie, mère de Dieu récapitule notre aventure de foi. La première lecture évoque le geste et le contenu des bénédictions qui seront partagées dans les familles et à l’église. La deuxième lecture évoque les effets de notre adoption et de notre inclusion dans la famille divine.  Enfin, l’évangile nous propose l’exemple de Marie. Première disciple de Jésus, profondément à l’écoute de tout ce qui se dit sur son fils, Marie nous enseigne par son silence attentif à ne jamais oublier de garder les yeux de notre cœur fixés sur Jésus.

     Autant d’affirmations et de propositions qui permettent de commencer l’année sur le bon pied… Autant de contenus qui étoffent les chants traditionnels de ce Jour de l’An : Mon Dieu, bénissez la nouvelle année et… Peuple fidèle!

Que la bénédiction se multiplie!
(Nombres 6, 22-27)

     Le premier de l'An réveille émotions et allergies dans les familles où l'on tient à la bénédiction. Que la mère et le père s'associent à cette gestuelle familiale ne règle pas les angoisses de fond : « Pourquoi faisons-nous ce geste une fois par année?  Quelles paroles faut-il dire pour que la bénédiction soit efficace? »

     Heureuse coïncidence: la première lecture rapporte une triple bénédiction proposée par Dieu lui-même à Moïse, relayeur des paroles du Seigneur vers Aaron et ses descendants. La première lecture présente le canal de diffusion mis en place par Moïse pour diffuser sa propre expérience spirituelle dans tout le Peuple de Dieu, d'une génération à l'autre.

     La bénédiction proclamée aujourd’hui est insérée dans une forme particulière du texte biblique. Cette structure « Dieu dit de dire… » est une technique courante dans la Bible pour attirer l’attention sur une transmission à répandre au fil des générations. Ce qui nous rappelle que la bénédiction du Premier de l’An, dans nos familles, est un geste des parents chrétiens qui veulent faire passer des valeurs reçues aux générations suivantes. 

     Une de ces valeurs est la conscience que notre Dieu est proche de nos vies quotidiennes. Tout le contraire de l’expérience initiale de Moïse au désert! Il perçut la différence immense qui sépare la réalité humaine et la sainteté de Dieu. Dieu lui disait :  Tu ne peux pas voir ma face, car l'homme ne peut me voir et demeurer en vie. Étrange paradoxe : la rencontre risquée de Moïse avec Dieu sur la montagne devint source de vie pour le peuple, par la grâce de Dieu. La chance de Moïse, racontée en Exode 34, 18-23, devait être partagée. Moïse voulut diffuser le bienfait reçu à la façon des remous causés par la chute d'une pierre dans l'eau, en cercles concentriques.

     Les adjoints de Moïse (Aaron et ses fils) furent donc chargés de transmettre ces mots importants à l'ensemble du peuple, grâce à une formule très ramassée. On y rappelle que le nom de Dieu (« bénédiction », « disant-du-bien ») est en même temps l'action de Dieu, protection, attention et paix.  Que le Seigneur te bénisse et te garde est un alliage très rare de bénédiction et de protection divines. Il rappelle l'affirmation du psaume 121: Le Seigneur, ton gardien, le Seigneur, ton ombrage se tient près de toi... Ainsi se vivra le face-à-face avec Dieu dans les générations à venir.

     En passant, une curiosité archéologique. On a retrouvé à Jérusalem une amulette en argent datant de plusieurs siècles avant Jésus Christ. Cette amulette gravée porte les mots de la bénédiction que nous proclamons en ce premier de l’An. Nous voilà ainsi en communion profonde avec nos lointains ancêtres dans la foi, les Hébreux et les Juifs du pays de Jésus…

Que notre adoption nous comble!
(Galates 4, 4-7) 

     La bénédiction annoncée aux descendants du peuple du désert nous rejoint. Dieu notre Père a poussé à fond la bénédiction de Moïse en insérant son égal, son Fils, dans le peuple de la première alliance. La deuxième lecture décrit ce beau parcours de générosité divine : Dieu a envoyé son Fils; né d'une femme et soumis à la Loi de Moïse afin de racheter ceux qui étaient soumis à la Loi et pour que nous soyons adoptés comme fils…  Tu n'es plus esclave, mais fils, et puisque tu es fils, tu es aussi héritier : c’est l’œuvre de Dieu. Voilà ce qui enchantait les premières générations chrétiennes : l’inclusion dans une relation de fils et de filles avec Dieu lui-même. On vivait dans une société où importait tellement l’appartenance bienveillante auprès d’un « patron », dispensateur de tous les bienfaits imaginables. Il ne faut pas s’étonner que la Bible célèbre une telle inclusion.
Voilà pourquoi le geste de bénédiction des parents, au Premier de l'An, peut dire plus que la tendresse humaine. L'héritage transmis dans la bénédiction familiale peut évoquer la source de toutes les largesses, de tous les héritages : le patrimoine de bonté et de salut préparé pour nous par notre Dieu.

Que la mère de Dieu nous inspire!
(Luc 2, 16-21) 

     L’évangile est bref en ce jour de fête. Il offre la suite du récit proclamé dans la nuit de Noël. On peut juger bien mince la brochette d’événements racontés. Et pourtant, le vocabulaire utilisé compile des actions propres aux disciples. Il est fait mention de découvrir, annoncer, raconter, retenir, méditer, repartir, glorifier, louer. Il est aussi question du nom «Jésus» : Dieu sauve…

     La présence de Marie semble bien anodine, de prime abord. Les bergers sont motivés par la rencontre avec Jésus. Pourtant, le double rôle marial d’écoute et de gardienne de la mémoire s’avère fondamental pour la suite des choses. Marie se présente comme le Concile Vatican II l’a décrite : elle est la première des disciples. La personne disciple découvre bien vite dans son parcours spirituel à quel point le comportement de Marie est un modèle.  Notre identité de chrétien n’est pas seulement ancrée dans le passé.  Notre identité continue de se forger et de se transfuser à l’avenir en se basant sur le fond solide transmis par les générations précédentes.

     Puissent les attitudes décrites dans ces quelques lignes d’évangile nous faire apprécier le don de la paix célébré aujourd’hui! Puisse ce don précieux s’enraciner même dans les pays des origines de notre foi aujourd’hui intoxiqués par une guerre innommable! Il nous revient d’incarner le rêve de la paix dans le quotidien de cette nouvelle année…  Que raconterons-nous pour en transmettre le goût autour de nous? Que ferons-nous concrètement?

 

Alain Faucher, bibliste

 

Source : Le Feuillet biblique, no 2514. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

 

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