La Transfiguration. Duccio di Buoninsegna, circa 1308-1311. Tempera sur bois, 49 x 51 cm. National Gallery, Londres (Pinterest).

Jésus dans la lumière du Thabor

Julienne Côté Julienne Côté | 2e dimanche du Carême (C) – 17 mars 2019

La Transfiguration de Jésus : Luc 9,28b-36
Les lectures : Genèse 15, 5-12.17-18 ; Psaume 26 (27) ; Philippiens 3, 17–4,1
Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.

En nous, le Christ Jésus, Lumière de la Lumière, vient éclairer nos vies, dans les heures difficiles comme dans les jours de paix et de clarté.

En cette période de la montée vers Pâque, la communauté chrétienne est appelée à contempler Jésus Christ, Lumière sur notre route. Les lectures, riches de symboles et d’images percutantes, révèlent l’identité du Fils, rayonnant de la Lumière divine, nous invitant à l’espérance, à la conversion de notre regard et de notre agir.

Dans la prière, le Père identifie son Fils, Jésus

À plusieurs reprises, l’évangéliste Luc nous présente Jésus en prière : lors du baptême, dans le Jourdain (3,21-22), avant l’invitation faite aux disciples de se prononcer sur son identité qui conduira à la confession de foi de Pierre (9,18), à la transfiguration, à Getshémani (22,32.40-46) ; voir aussi 5,16; 6,12; 11,1. Dans ce moment de recueillement, au Thabor, une expérience unique a lieu, une union intense avec Dieu qui révèle l’identité profonde et la mission du prophète Jésus.

Il est dit que Jésus gravit la montagne, lieu où l’horizon est vaste, dégagée des lourdeurs et des contraintes du quotidien, lieu de silence propice à une rencontre intime. Son visage apparut tout autre, ses vêtements devinrent d’une blancheur éclatante (v. 29). C’est dans un état de gloire que Jésus apparaît, ainsi que les deux hommes, piliers de l’Ancien Testament, qui s’entretiennent avec Lui. Cette vision de Jésus avec Moïse et Élie, que nous dévoile-t-elle? Les deux figures du Premier Testament évoquent l’attente juive et toute l’histoire du peuple d’Israël. Les deux témoins ont fréquenté au Sinaï le Dieu de gloire (Exode 19,17-18; 1 Rois 19,9-13). Moïse, le libérateur du peuple d’Israël, est celui qui a reçu la Loi; Élie est le pourfendeur des idoles, le précurseur du Messie (Malachie 3,23s), enlevé au ciel dans un char de feu. Ces deux hommes ne font qu’un avec le Christ, ils sont vivants en Lui, ils s’entretiennent de l’accomplissement des Écritures : en Jésus qui est au centre de l’histoire sont accomplis la Loi et les Prophètes. Les trois évoquent aussi le chemin « d’exode » qui attend Jésus (v. 31), la sortie de ce monde, le passage en Dieu que va vivre le Maître, en se rendant à Jérusalem (9,31.51.53). C’est à dire sa mort-résurrection qui ouvrira un chemin de libération pour toute l’humanité.

Les trois disciples, accablés de sommeil

Les disciples, accablés de sommeil semblent incapables de s’associer à la prière de leur Maître. Ils ne saisissent pas encore qui Il est vraiment, quelle est sa mission. Après la reconnaissance de Jésus comme étant le Christ (9,21), Pierre refuse l’annonce de sa passion et réprimande, morigène son Maître qui sera condamné, livré aux pouvoirs du Sanhédrin et de Pilate, à Jérusalem (9,22; voir Matthieu 16,22). À ce moment, Jésus lui dit : retire-toi! Derrière-moi, Satan! Tes vues ne sont pas celles de Dieu... (voir Matthieu 16,23; Marc 8,32). Maintenant, huit jours après (9,28), au Thabor, lorsque les disciples se réveillent et qu’ils expérimentent la gloire de Jésus, Pierre parle de dresser trois tentes (Exode 33,7-11), autrement dit, il parle de s’installer, de s’arrêter dans les hauteurs, d’ignorer le passage de la croix.Son propos est fort éloigné de la trajectoire de Jésus. Pierre et les deux autres disciples ne saisissent pas que la vie et la mort de leur Maître est en relation avec tout ce qui a été annoncé dans l’Ancienne Alliance. Puis, ils furent saisis de frayeur (v. 34). Cette frayeur les rejoint au moment de la nuée lumineuse, signe d’une entrée dans la présence divine et d’une rencontre transfigurante (Exode 24,18). La voix dans la nuée est celle du Père dévoilant l’identité de Jésus : Celui-ci est mon Fils, celui que j’ai choisi : écoutez-le (9,35). Écoutez-le. Dépassez vos ambitions et vos préoccupations matérielles, ouvrez vos yeux et votre cœur à la Lumière divine qu’est le Christ et à l’alliance d’amour dans laquelle Il introduit toute l’humanité.

Psaume 26 (27)

LePsaume évoque la confiance du priant qui nourrit son espérance dans les promesses divines. On pense à Abraham et à sa foi totale, qui, dans des circonstances difficiles, sait garder confiance (v. 1). La recherche de la face du Seigneur, la soif de Dieu (v. 8) est largement comblée quand on médite le verset évangélique : Pendant qu’il priait, son visage apparut tout autre, ses vêtements devinrent d’une blancheur éclatante (v. 29). Et nous, chrétiens du 21e siècle, dans la lumière de la résurrection du Christ, Seigneur, nous pouvons chanter le Seigneur est ma lumière et mon salut... je verrai les bontés du Seigneur sur la terre des vivants... (vv. 1 et 13).

Genèse 15, 5-12.17-18

La première lecture,nous fait rencontrer la digne figure d’Abraham que Dieu a choisi pour faire Alliance et fonder son peuple qui habitera la terre promise (12,1). Comment le savoir et en être sûr? Abraham marche et marche, et la vieillesse le rejoint sans descendance. Mais Dieu lui assure toujours que celle-ci sera nombreuse comme les milliards d’étoiles dans la voûte céleste (15,5). L’homme maintient sa foi en la parole donnée, une foi solide, assurée qui s’appuie sur la promesse de Dieu. Il fait confiance jusqu’au bout.

L’auteur présente ensuite Abraham sur le point de se livrer à une cérémonie rituelle de conclusion d’alliance développée par les tribus de son époque. Les deux contractants passaient entre les moitiés d’animaux immolés, pour sceller leur contrat. Abraham ne fait qu’immoler les animaux en écartant les oiseaux (15,9-17)... Et voilà qu’un sommeil mystérieux s’empara de lui, une sombre et profonde frayeur le saisit... Seul le Seigneur conclut l’alliance. Dans l’œuvre de la création, l’homme n’est pas à égalité avec Dieu, c’est Dieu qui prend toute l’initiative, qui promet et accomplit sans conditions préalables. Et l’homme est appelé à donner sa confiance, en accordant sa conduite au projet de Dieu, en « s’ajustant » au dessein divin. Cette attitude équivaut à un acte de justice. C’est vraiment la rencontre de deux gratuités.

Philippiens 3, 17-4,1

Ce passage de la lettre met en garde les chrétiens qui, en l’absence de Paul, mettent leur gloire dans ce qui fait leur honte, cherchent leur salut en reprenant les observances alimentaires exigées au peuple juif, ou encore la pratique de la circoncision. Lui, Paul, a préféré tout perdre pour connaître le Christ et la puissance de sa résurrection. Le Christ transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux (3,21). Au jour de la résurrection, à l’intérieur de leur cheminement terrestre, le Christ n’a-t-il pas procuré à Pierre, Jean et Jacques, l’éclat de cette transformation? N’ont-ils pas basculé dans le monde de la Lumière divine ?

Membre de la Congrégation de Notre-Dame, Julienne Côté a fait ses études supérieures en théologie et en études bibliques à l’Institut catholique de Paris. Elle a écrit pour la revue Vie liturgique de 1985 à 1990 et collabore au Feuillet biblique depuis 1987.

Source : Le Feuillet biblique, no 2611. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l’autorisation du Diocèse de Montréal.

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