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Voie, vérité et vie

Benoît LambertBenoît Lambert | 5e dimanche de Pâques (A) – 10 mai 2020

Jésus, chemin vers le Père : Jean 14, 1-12
Les lectures : Actes 6, 1-7 ; Psaume 32 (33) ; 1 Pierre 2, 4-9
Les citations bibliques sont tirées de la Traduction liturgique officielle.

Lors du dernier repas, Jésus avertit ses disciples qu’il va bientôt mourir. Cette annonce crée un sentiment d’insécurité parmi les apôtres. Leur Maître va disparaître! Les interrogations fusent.

Une mise au point

Avant d’apaiser ses disciples, Jésus leur donne l’ultime conseil pour rester serein à travers les tribulations qui se dessinent : croire en lui. La foi constitue l’acte extérieur nécessaire pour que l’être humain puisse accéder aux biens célestes. Le malaise des Douze permet de constater qu’ils n’ont pas saisi l’identité de Jésus. Les apôtres, comme l’ensemble de leurs concitoyens de la nation sainte, ne croient pas qu’un être humain peut aussi être Dieu. Et ils n’ont pas modifié leur croyance même après avoir partagé l’intimité du Seigneur. Jésus les incite donc à dépasser ce que leur éducation religieuse leur a transmise. Après cette mise au point (Croyez au Père, croyez en moi), Jésus va tenter de diminuer la tension qui s’est installée.

Une tentative d’apaisement

Jésus promet que son départ de la terre ne signifie pas que l’aventure des disciples est terminée. Le Seigneur rejoint son Père dans le but de préparer une demeure pour les Douze et pour toutes les personnes qui ont et auront foi en Lui. Le mot « demeure » est très significatif chez l’évangéliste Jean (Jn 1,38 ; 6,56-57). Il implique une permanence, une résidence où l’on s’installe pour une longue durée. De plus, ce terme johannique implique une union qui se réalise dans l’esprit des personnes. Il faut préciser, qu’à part la foi, Jésus ne donne aucun critère pour avoir accès aux demeures qu’il va préparer dans les cieux. Il mentionne seulement qu’il y aura une multitude de maisons.

Ce propos rejoint le message de la première lecture (Actes 6,1-7). Dès les premiers instants de l’Église, tous étaient acceptés dans la communauté chrétienne. Les païens y étaient inclus comme les juifs. L’Église a respecté leur différence culturelle en leur assignant des serviteurs qui étaient eux aussi des païens convertis au christianisme. Toutes les personnes qui ont la foi pourront devenir les amis du Christ. Malgré cet engagement de préparer un lieu et de revenir pour les y amener, les apôtres restent craintifs. Ils ne sont pas encore convaincus que Jésus est Dieu. Jésus aurait pu devenir exaspéré devant la forte incompréhension des disciples. Au lieu d’avoir cette réaction, il va se faire pédagogue. Au lieu de faire une déclaration d’autorité en exprimant explicitement sa nature, il va dévoiler son identité en détaillant ses relations avec le Père. Et il emploiera trois images : Voie, Vérité et Vie.

La Voie, la Vérité

L’héritage laissé par le Christ à l’humanité n’est pas un mode d’emploi fait de rites et de connaissances qui permettraient d’accéder à la sainteté. Il n’est pas non plus un discours rationnel, philosophique qui prouverait l’existence d’une entité suprême. En mettant en lumière ses relations avec le Père et en employant le pronom « Je », Jésus montre que le salut s’oriente plutôt vers sa Personne. Comme il est uni au Père, le chemin vers la demeure du Créateur passe donc par une relation avec le Seigneur. Et ce chemin se nomme « amour ». La dynamique de l’amour est de dégager l’individu qui aime de ses desseins égoïstes, de se tourner vers l’Autre et vers le bien-être de son prochain. Le Christ est l’exemple parfait que l’humanité doit suivre. Le Seigneur a tant aimé son Père qu’il a fait sa volonté. En acceptant d’abandonner les mouvements de sa conscience inspirés par son instinct de conservation qui l’aurait incité à fuir la Croix, le Christ a définitivement établi une nouvelle alliance entre la Trinité et l’être humain. En empruntant la voie du Ressuscité, le voyage où nos mouvements égoïstes sont crucifiés pour laisser place à l’altruisme, les personnes deviennent des frères et des sœurs du Fils.

Jésus se présente aussi comme la Vérité. La vérité chrétienne ne constitue donc pas un simple appel à la compassion. Elle est plutôt une personne : le Christ. Dans l’univers, le Fils incarné est la réalité ultime de notre monde. Il ne sert à rien de chercher ce qui donne à notre existence son plein potentiel dans d’autres sources qui combleront partiellement la soif d’absolu des gens. Le Christ est la seule réponse véritable à cette quête puisqu’il est l’Unique qui donne aux gens l’accès à la réalité qui les satisfera pleinement. La deuxième lecture confirme ce point (1 Pierre 2,4-9). Le Christ est la pierre d’angle de l’Église. Cependant, Pierre ajoute un argument qui n’est pas explicite dans l’Évangile. Les gens qui n’ont pas la foi, qui n’acceptent pas de se lier au Christ, ne seront pas sauvés. Ils n’accéderont pas aux espaces préparés pour les siens par Jésus dans le Royaume des cieux. En faisant cette déclaration, Pierre s’inspire des propos de Jésus concernant le péché contre l’Esprit. C’est la seule faute impardonnable puisqu’elle signifie que la personne a refusé d’ouvrir son cœur à l’amour du Rédempteur.

La Vie

En expliquant ses relations avec le Père, Jésus veut introduire ses disciples à une idée qu’ils n’auraient jamais envisagée. En mourant et en ressuscitant, en laissant dans son cœur toute la place aux inspirations du Père, Jésus a joint définitivement son humanité au Créateur. L’Esprit Saint constitue le lien amoureux qui unit les deux protagonistes de cette relation surnaturelle. Désormais, le mouvement inhérent à l’amour se produit : il se diffuse. Il y a communication d’amitié entre Dieu et les gens. L’Esprit Saint est donné par le Fils aux hommes et aux femmes. Les baptisés peuvent déjà vivre de la vie trinitaire dans le monde d’aujourd’hui. La demeure promise par Jésus est donc un état intérieur, une réalité immatérielle présente dans l’esprit humain. Dieu gratifie ses enfants de sa propre force pour les élever vers Lui. La vie trinitaire est désormais active dans l’âme humaine. Mais cette vie est accordée seulement, comme le rappelle Jésus et Pierre, si la personne tourne son esprit vers le Sauveur. Le temps de Pâques est un moment particulièrement propice pour approfondir son union avec le Christ. Cette démarche rendra chaque enfant de Dieu plus heureux et plus engagé dans la construction de sociétés plus justes et plus respectueuses de la dignité des hommes et des femmes.

Détenteur d’une maîtrise ès arts (théologie) de l’Université Laval, Benoît Lambert a rédigé des articles et des brochures pour plusieurs revues religieuses (Vie liturgique, Revue Notre-Dame-du-Cap). Il collabore au Feuillet biblique depuis 1995.

Source : Le Feuillet biblique, no 2663. Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l’autorisation du Diocèse de Montréal.

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