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Les Psaumes

 

David
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chronique du 16 février 2007
 

Dieu est bon pour Israël: le Psaume 73 (72)

Le Psaume 73 (72) est un psaume moderne. Il est bien compris par les hommes et les femmes de notre temps car son auteur exprime un doute qu’il a ressenti dans  sa foi. Notre époque en est une de questionnement et d’examen de soi-même : croire en Dieu, qu’est ce que ça me donne? Est-ce que la foi me rend plus heureux, alors que je vois tant d’autres, des « méchants » qui paraissent si contents de leur vie sans que Dieu y soit présent? L’énigme est parfois formulée dans les termes : pourquoi les « autres », les riches sont-ils si heureux et pourquoi les pauvres le sont-ils si peu?

     Le Père Vesco, dominicain, ancien directeur de l’École biblique de Jérusalem, a intitulé un commentaire bref de ce psaume : « Union à Dieu et tentation. » C’est bien trouvé. On remarquera la tentation dans les premières lignes; le psalmiste a été tenté de lâcher Dieu à cause de sa jalousie des gens qui réussissent. Sa vie n’a pas été aussi achevée ou fortunée qu’il l’aurait souhaitée, de là l’idée de délaisser Dieu qui en aurait été responsable.

     On remarquera les mentions d’Israël qui a vécu dans son alliance avec Dieu les mêmes crises que le psalmiste. Des mots ici et là  témoignent d’une relecture du texte original modifié pour que la communauté du peuple de Dieu soit consciente d’éprouver des sentiments analogues à ceux de l’auteur.

     Voici le Psaume 72 (73) dans  sa version de la liturgie des heures.

1 Vraiment Dieu est bon pour Israël,
Pour les hommes au cœur pur.

2 Un rien, et je perdais pied,
Un peu plus, et je faisais un faux pas;
3 Car j’étais jaloux des superbes,
Je voyais le succès des impies.

4 Jusqu’à leur mort, ils ne manquent de rien,
Ils jouissent d’une santé parfaite;
5 Ils échappent aux souffrances des hommes,
Aux coups qui frappent les mortels.

6 Ainsi, l’orgueil est leur collier,
La violence, l’habit qui les couvre;
7 Leurs yeux qui brillent de bien-être
Trahissent les envies de leur cœur.

8 Ils ricanent, ils prônent le mal,
De très haut, ils prônent la force;
9 Leur bouche accapare le ciel,
Et leur langue parcourt la terre.

10 Ainsi , le peuple se détourne
Vers la source d’une telle abondance.
11 Ils disent : « Comment Dieu saurait-il?
Le Très-Haut, que peut-il savoir? »

12 Voyez comme sont les impies :
Tranquilles, ils amassent des fortunes.

13 Vraiment, c’est en vain que j’ai gardé mon cœur pur,
Lavé mes mains en signe d’innocence!
14 Me voici frappé chaque jour,
Châtié dès le matin.

15 Si j’avais dit : « Je vais parler comme eux »,
J’aurais trahi la race de tes fils.
16 Longtemps, j’ai cherché à savoir,
Je me suis donné de la peine.

     La première partie du psaume pose très bien les éléments du drame que le psalmiste a vécu. Il a longuement examiné les privilégiés qui dévorent la vie à pleines dents : leur bouche est tellement avide que leurs mâchoires s’ouvrent pour engloutir même la voûte du ciel. Leur langue lape d’un seul coup ce qu’il y a de délicieux en ce monde (v. 8). Tout cela l’a amené à douter que le Seigneur s’occupe d’une situation si tragiquement injuste.

17 Mais quand j’entrai dans la demeure de Dieu,
Je compris quel serait leur avenir.
18 Vraiment, tu les as mis sur la pente :
Déjà tu les entraînes vers la ruine.

19 Comment vont-ils soudain au désastre,
Anéantis, achevés par la terreur?
20 À ton réveil, Seigneur, tu chasses leur image,
 Comme un songe au sortir du sommeil.

     Le psalmiste est entré dans un sanctuaire. Son histoire devient celle d’un pèlerinage qui l’a fait réfléchir. Au fond les apparences sont trompeuses. Le bonheur des sans-Dieu n’est qu’illusion. Ils sont orientés vers un destin vide de sens. Le regard envieux que le psalmiste dirigeait vers eux est inutile, stérile. Dieu substitue une autre vision de la réalité.

21 Oui, mon cœur s’aigrissait,
J’avais les reins transpercés.
22 Moi, stupide, comme une bête,
je ne savais pas, mais j’étais avec toi.

23 Moi,  je suis toujours avec toi,
Avec toi qui as saisi ma main droite.
24 Tu me conduis selon tes desseins;
Puis tu me prendras dans la gloire.

25 Qui donc est pour moi dans le ciel
Si je n’ai, même avec toi, aucune joie sur la terre?
26 Ma chair et mon cœur sont usés :
Ma part, le roc de mon cœur, c’est Dieu pour toujours.

27 Qui s’éloigne de toi périra :
Tu détruis ceux qui te délaissent,
28 Pour moi, il est bon d’être proche de Dieu;
J’ai pris refuge auprès de mon Dieu
Pour annoncer les œuvres du Seigneur
Aux portes de Sion.

     Une réflexion de sagesse conduit l’orant à dire au Seigneur que maintenant, il se rend compte de son bonheur : « Je suis toujours avec toi. » (v. 23) Sa pensée l’amène à revenir sur ses malheurs (v. 25-26). Il découvre que c’est par l’union à Dieu, son ami, que  la joie et la paix subsistent. La rentrée en lui-même fait penser à l’enfant prodigue qui au milieu du troupeau de porcs dont il est le gardien, opère une « métanie », un changement d’esprit.

     La présence réconfortante de Dieu pourrait se comparer à une expérience mystique, le regard au fond des choses. Comment expliquer la sérénité de certains grands malades, sinon par l’appréhension d’un grand amour de Dieu dans le secret du cœur.

     La lueur d’un invincible espoir brille dans ce psaume. « Tu me prendras dans ta gloire. » (v. 24) Il y a là comme un clin d’œil entendu et confiant vers une éternité dont Dieu ne sera pas absent. Vision furtive et encore imprécise d’un au-delà de la communion d’amour commencée dès ici-bas. Peu importe le , peu importe le quand, l’essentiel est l’avec. Le méchant et sa prospérité sont maintenant bien loin. L’épreuve a fait place au bonheur et dans le cœur du juste, il y a déjà une béatitude qui ne finira pas. Même la mort n’y pourra mettre un terme. Quand? Comment cela se fera-t-il? À Dieu d’en décider et on lui fait confiance.

Pierre Bougie, PSS

 

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