Qui demeurera sur ta montagne sainte ? Psaume 15 (14)

Seigneur, qui sera reçu dans ta tente?
Qui demeurera sur ta montagne sainte?

L’homme à la conduite intègre,
Qui pratique la justice
Et dont les pensées sont honnêtes.
Il n’a pas laissé courir sa langue,
Ni fait tort aux autres,
Ni outragé son prochain.

À ses yeux, le réprouvé est méprisable;
Mais il honore ceux qui craignent le Seigneur.
Se fait-il tort dans un serment, il ne se rétracte pas.
Il n’a pas prêté son argent à intérêt,
Ni rien accepté pour perdre un innocent.

Qui agit ainsi reste inébranlable.

Traduction officielle liturgique

Dans toute son intégrité

     J’imagine. Un homme sur la route. Le bâton à la main, des sandales aux pieds, une petite besace presque vide. Absorbé dans ses pensées, il marche vers Jérusalem. À l’entrée de la ville sainte, il s’arrête devant un prêtre ou un prophète. Pour se préparer à pénétrer dans le Temple, il demande à  l’homme de Dieu, à Dieu lui-même (d’après les adjectifs possessifs) :

« Seigneur, qui sera reçu dans ta tente?
Qui demeurera sur ta montagne sainte? »

     Le prêtre répond par un enseignement. Cette catéchèse prépare le pèlerin à entrer dans le lieu saint dans de bonnes dispositions.

     La catéchèse présente une description du parfait pèlerin. C’est un homme à la conduite intègre, un homme honnête, qui ne s’est pas laissé corrompre par l’argent ou les honneurs. Bien plus, il est tout entier pur, unifié. Ici, l’intégrité est « l’unité intérieure de celui qui s’est gardé intact, sans altération ni corruption, mais aussi sans dispersion, qui est tout entier à Dieu, consent totalement à l’Alliance, accepte la loi comme un tout, sans rien en retrancher, et ainsi, sans rien retrancher à soi-même ». [1]

     Pour pénétrer dans le Temple, il faut avoir des attitudes et des comportements en tous points ajustés à son Seigneur. « On t’a fait connaître, ô homme, ce qui est bien, ce que le Seigneur exige de toi : rien d’autre que le respect du droit, l’amour de la fidélité, la vigilance dans ta marche avec Dieu. » (Mi 6,8. Cf. Dt 26,1-15, où est décrit le rituel de la visite au Temple)

     L’homme à la « conduite intègre » aura un discours respectueux des autres. Le psaume insiste. On n’entendra pas le pèlerin déblatérer contre son prochain, lui faire du tort, l’outrager. Devant celui qui choisit délibérément le mal, qui refuse Dieu, qui se tient loin de l’Alliance, l’homme fidèle à Dieu réagira en disant : « Qui suis-je pour juger?... » sans pour autant bénir la réprobation du réprouvé. Pour ceux et celles qui respectent Dieu, ceux qui craignent le Seigneur, le pèlerin n’aura que de l’admiration. Il sera vrai dans ses serments, honnête dans ses transactions financières, protecteur de l’innocent.

     Conclusion de la catéchèse : celui qui entre au Temple, dans la Tente de la rencontre, sur la sainte montagne, est quelqu’un d’inébranlable comme le Temple est inébranlable :

Ceux qui comptent sur le Seigneur
Sont comme le mont Sion :
Il est inébranlable,
Il demeure toujours. (Psaume 125 (124))

     Le premier à correspondre à cette description du vrai pèlerin n’est-ce pas Jésus lui-même! Auprès de Dieu, dans le Temple du Très-Haut, il précède le pèlerin du psaume, il nous précède nous-mêmes. Dans toute son intégrité, dans toute sa sainteté.

[1] M. Mannati, Les psaumes, tome 1, Paris, Desclée de Brouwer (coll. « Cahiers de la Pierre-qui-vire »), 1966, p. 174.