(photo © ACRB)

Une invitation à croire

Hélène Pinard Hélène BoudreauHélène Pinard et Hélène Boudreau | 10 octobre 2022

Lors de la journée de consolidation de l’ACRB le 24 septembre dernier, nous avons vécu une vitamine biblique particulièrement dynamique. L’étude portait sur les deux épisodes de la péricope de Luc 8,40-56, soit la guérison de la femme hémorroïsse et celle de la fille de Jaïre.

Dans un premier temps, les appreneurs ont été invités à noter individuellement les répétitions et les contrastes entre les deux parties du texte (vv. 43-48 et 41-42 ; vv. 49-56) [1]. Chaque personne a partagé ses découvertes. Ceci a engendré une réflexion dense, fruit d’un apprentissage du récitatif qui s’est entamé pendant cinq jours en juin, qui s’est poursuivi en « portage » tout au long de l’été pour se cristalliser lors de la journée du 24 septembre. Toutes les idées exprimées ci-dessous l’ont été par des participantes à la session de consolidation.

Répétitions dans les deux épisodes

Voici les idées principales qui ont été partagées.

  • Dans les deux épisodes, il est question de 12 ans : la femme hémorroïsse souffre depuis 12 ans (v. 43) et la fille de Jaïre a 12 ans (v. 42). Ces deux personnes n’avaient pu être guéries, elles étaient donc en besoin de guérison.
  • Jaïre et la femme hémorroïsse tombent aux pieds de Jésus, l’un avant la guérison (v. 41), l’autre après (v. 47)
  • Dans les deux épisodes, on retrouve l’emploi du mot « chef », par deux fois s’appliquant à Jaïre, (vv. 41, 49) et une fois lorsque Pierre s’adresse à Jésus (v. 45).
  • Dans les deux guérisons, Jésus affirme que c’est la foi qui sauve : (vv. 48, 50) Tout de suite après chaque guérison, on retrouve la précision « à l’instant même » (vv. 44 ; 55)
  • Il y a aussi une incrédulité de la part de personnes présentes : « Chef, ce sont les foules qui te serrent et qui te pressent » dira Pierre à Jésus pour expliquer le fait qu’on l’ait touché (v. 45). À la maison de Jaïre, « ils se moquaient de (Jésus), sachant qu’elle était morte » (v. 53). Dans les deux cas, Jésus réplique en s’affirmant : « Quelqu’un m’a touché car j’ai connu qu’une Puissance était sortie de moi » (v. 46) et « Mais lui, ayant saisi sa main l’appela en disant... » (v. 54)
  • Les deux fois, Jésus a le mot de la fin : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Fais route vers la paix » (v. 48) et « Il commanda de lui donner à manger… Il leur recommanda de ne dire à personne ce qui était arrivé. » (vv. 55-56).

Contrastes entre les deux épisodes

  • Dans la première partie, c’est une femme qui est guérie vv. 43-44), dans la seconde, il s’agit d’une enfant (v. 42, vv. 54-55).
  • Jaïre se présente devant Jésus (v. 41), la femme, elle, s’approche par derrière (v. 44)
  • Personne n’est même au courant de l’état de la femme hémorroïsse alors que pour la fille de Jaïre « tous pleuraient » (v. 52).
  • Jaïre demande publiquement que sa fille soit guérie (vv. 41-42) alors que la femme hémorroïsse obtient sa guérison en secret (vv. 43-44).
  • La femme agit avec confiance (vv. 44, 47) alors que Jésus doit inviter à croire que le salut est possible suite à l’annonce de la mort de l’enfant (v. 50).
  • La femme hémorroïsse n’a pas un statut social enviable : elle est une femme, qui plus est, en saignement continu, donc impure. Elle n’a plus rien à perdre « ayant dépensé tout son bien en médecins » (v. 43). Jaïre jouit d’un statut social proéminent en tant que chef de synagogue. Il a tout à perdre : la vie de son enfant et potentiellement son statut social en tant que chef de synagogue s’il met sa foi en Jésus et que sa démarche s’avère infructueuse.
  • Dans un revirement de situation, la femme témoigne publiquement de sa guérison (v. 47) alors que les parents de la fille sont invités à « ne dire à personne ce qui était arrivé » (v. 56).
  • Alors qu’aux versets 42 et 46, Jésus est étouffé, serré et pressé par les foules, lorsqu’il arrive à la maison de Jaïre, il choisit qui a accès à l’intérieur de la maison : « Il ne laissa personne entrer avec lui, sinon Pierre, et Jean et Jacques, et le père de l’enfant et la mère » (v. 51).
  • Les façons de toucher sont également différentes. Au verset 45, c’est la femme qui touche la frange du vêtement de Jésus alors qu’au verset 54, c’est Jésus qui saisit la main de l’enfant.

Questions et réactions

Au cours de cet échange, des questions ont surgi.

  • Est-ce notre expérience que la réponse de Jésus arrive « à l’instant même! »?
  • À qui Jésus s’adresse-t-il quand il dit : « Sois sans crainte, crois seulement »?
  • Est-ce uniquement à Jaïre, ou encore au messager?
    • Plusieurs se sont demandés si ceux qui pleuraient étaient aussi les moqueurs (ils se moquaient de lui), et si les disciples Pierre, Jean et Jacques ou les parents en faisaient partie.

    Conclusion des échanges

    Hélène Pinard a conclu la vitamine en offrant une interprétation du message central de cette péricope.

    Deux personnes font face à une transition majeure, un « passage ». Face aux défis de la vie, il y a des « pas sages » à oser. Ce qui nous permet d’affronter ces moments plus difficiles, pour plus de liberté intérieure, c’est la foi, relation avec l’Autre, avec les autres.

    Quand Jésus répond, suite à l’annonce de la mort de la fille de Jaïre : « Sois sans crainte, crois seulement », à qui s’adresse-t-il? À Jaïre ou à quelqu’un (v. 49)? N’ouvre-t-il pas une porte au lecteur : entreras-tu, toi aussi, dans une relation de confiance devant ce qui paraît impossible, pour être sauvé? C’est la relation au Christ, la foi, qui réalise la guérison « à l’instant même ». Elle ne peut agir ni dans le passé ni dans le futur puisque la relation se vit au présent.

    Comme le disait une participante : « Pour Dieu, c’est toujours maintenant », l’instant présent.

    Hélène Pinard, FCSCJ, est bibliste et transmetteure de l’Association canadienne du récitatif biblique. Hélène Boudreau est aussi transmetteure de l’Association.

    [1] Traduction adaptée par sœur Hélène Pinard, bibliste.

Jousse

Récitatif biblique

L'Association canadienne du récitatif biblique propose une chronique mensuelle pour comprendre la discipline spirituelle qui rassemble ses membres. Axée sur la Parole et sur son effet sur l'ensemble de la personne, le récitatif biblique est une forme de méditation où tous les sens sont sollicités.