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Comprendre la Bible
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chronique du 9 novembre 2007

 

La mauvaise réputation du serpent

Combat contre le serpent Apophis

Combat contre le serpent Apophis
Livre des Morts
Musée du Louvre, Paris (France)

Question

Nous aimerions savoir si la Bible a joué un rôle important dans la réputation du serpent? Est-ce que la réputation de cet animal est complètement négative? (Bastien)
 

RéponseEn fait, c’est l’inverse qui s’est produit. C’est parce que, dans toutes les cultures anciennes, le serpent a mauvaise réputation que la Bible le présente de la même façon. Les serpent sont répugnants à plusieurs personnes. Ils rampent sans qu’on les voit, sont souvent venimeux, etc. Dans le psychologie des profondeurs, la forme phallique des serpents est aussi suggestive. C’est pourquoi la Bible reflète les croyances et conceptions des peuples qui l’ont écrite. L’image du serpent est, oui, toujours négative. Les Anciens n’avaient pas le luxe de l’écologie. Leur relation avec le monde était souvent conflictuelle. Ils devaient d’abord et avant tout survivre dans un environnement trop souvent hostile, où guerres, famines et maladies les menaçaient constamment. On comprendra donc que, pour eux, l’herpétologie (science qui étudie les reptiles) était le dernier de leur souci.

     Les passages sur les serpents dans la Bible se divisent donc selon les thèmes suivants :

  • le serpent comme animal - Peu de mentions, par exemple Dt 8,15 pour illustrer combien le désert est redoutable à cause des serpents qui y habitent ; Am 5,19 et Qo 10,8.11 combien le serpent est dangereux ; Pr 30,19, combien il est sournois. Ac 28,3-6 raconte comment saint Paul, après son naufrage sur l’île de Malte, aurait survécu miraculeusement à la morsure d’un serpent.
  • le serpent comme comparaison - Ces caractéristiques négatives et dangereuses de l’animal font en sorte qu’on peut dire de quelqu’un qu’il est un serpent (Gn 49,17) ; que les ennemis d’Israël sont comme des serpents (Dt 32,33) ; Édom dévasté redeviendra un désert où habiteront les serpents (Is 34,15) ; « On conçoit la peine, on enfante le mal » comme un serpent sort de son œuf (Is 59,5). Aussi le Seigneur menace-t-il d’envoyer les serpents pour punir son peuple rebelle (Jr 8,17) ou les nations qui mordront la poussière (Mi 7,17) ; le malheur arrive sur l’Égypte, aussi imperceptible qu’un serpent (Jr 46,22) ; pas de pitié pour qui « joue avec le feu », comme un charmeur de serpent (Si 12,13) ; fuis le péché comme tu fuirais un serpent (Si 21,2) ; la haine de l’ennemi est pire que le venin (Si 25,15) ; le vin mord comme un serpent (Pr 23,32) ; les impies sont comme des serpents (Ps 58,5 et 140,4) ; un père ne donnerait pas un serpent à qui lui demanderait un poisson (Lc 11,11//Mt 7,10) ; Jésus traite ses adversaires de serpents (Mt 23,33).

     Peut-être y a-t-il une connotation un peu moins négative en Is 14,29 où le serpent qui sort de façon inattendue d’une souche morte indique que « tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir ». Mais il s’agit ici d’une qualité d’un défaut, c’est-à-dire l’aspect incompréhensible de la vie qui s’accroche. De même en Mt 10,16 où Jésus conseille à ses disciples d’être prudents comme des serpents. Seul Is 11,8 cité en 65,25 est positif en ce sens que le prophète envisage la paix messianique comme un temps où le serpent ne sera plus menaçant.

Le serpent dans sa valeur symbolique

     Comme la plupart des serpents vivent entre les pierres à cause de leur besoin de chaleur, ou dans le sable chaud du désert, on en tira la conclusion qu’ils mangeaient de la poussière (Gn 3,14). De là, ainsi que des autres particularités dont nous avons parlé, la symbolique du mal qui a lui été associé. On pense surtout au célèbre récit mythique de Gn 3 (cf. 2 Co 11,3), qui entend rendre compte du mystère même du mal dans le monde et dans l’humain; mais aussi en Nb 21,6-9 (cf. 2 R 18,4; Sg 16,5.10; Jn 3,14-15; 1 Co 10,9), ou dans Ap 12,9.14-15. Le pouvoir sur le mal implique donc le pouvoir sur les serpents (Mc 16,18; Lc 10,19; Ap 20,2; cf. Ac 28,3-6. Peut-être des textes plus difficiles comme Ex 4,3; 7,9-15).

Le serpent mythique

Combat contre le serpent Apophis

La destruction de Leviathan (détail)
gravure de Gustave Doré (1865)
d'après Isaïe 27,1

     Les Israélites n’ont jamais vécu près de la mer, ils n’ont jamais eu de flotte (sauf une courte période; cf. 1 R 9,26-27). Les baleines observées par les anciens marins en Méditerranée ne présentant que leur dos avec un énorme jet d’eau, l’imaginaire s’est vite emparé de ces créatures mystérieuses pour en faire des monstres. Les histoires des marins phéniciens ou autres, ainsi que les mythes de création mésopotamiens où la divinité organisatrice lutte contre un monstre-serpent qui comporte une connotation maléfique ont fait en sorte que certains textes bibliques évoquent aussi ce « monstre des origines » en forme de serpent qui aurait été vaincu par Dieu à l’origine du monde : Gn 1,21; Jb 3,8; 7,12; 26,12-13; Ps 74,13-14; 89,10-11; 148,7; Is 27,1; 51,9; Jr 51,34; Am 9,3.

Hervé Tremblay

Lire aussi  :
Le serpent en Orient et dans la Bible
Le serpent de la Genèse et sa symbolique
Le serpent d'Airain

Chronique précédente :
L’agneau mystique