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chronique du 5 mai 2017
 

Des femmes diacres et des épiscopes avec enfants

femmes influentes

Femmes influentes des premières communautés chrétiennes

Le mot grec episcopos signifie littéralement « celui qui surveille ». À la fin du premier siècle, l’épiscopat n’était pas encore un ministère très structuré, mais il désignait la tâche de responsables des communautés chrétiennes.

En ce sens, les épiscopes sont les ancêtres des évêques qui, encore aujourd’hui, sont les responsables des diocèses. Un passage de la lettre à Timothée énumère les qualités requises pour un bon épiscope.

1 Elle est digne de confiance, cette parole : si quelqu’un aspire à l’épiscopat, c’est une belle tâche qu’il désire. 2 Aussi faut-il que l’épiscope soit irréprochable, mari d’une seule femme, sobre, pondéré, de bonne tenue, hospitalier, capable d’enseigner, 3 ni buveur, ni batailleur, mais doux; qu’il ne soit ni querelleur, ni cupide. 4 Qu’il sache bien gouverner sa propre maison et tenir ses enfants dans la soumission, en toute dignité : 5 quelqu’un, en effet, qui ne saurait gouverner sa propre maison, comment prendrait-il soin d’une Église de Dieu? 6 Que ce ne soit pas un nouveau converti, de peur qu’il ne tombe, aveuglé par l’orgueil, sous la condamnation portée contre le diable. 7 Il faut de plus que ceux du dehors lui rendent un beau témoignage, afin qu’il ne tombe pas dans l’opprobre en même temps que dans les filets du diable. (1 Timothée 3, 10-7)

Un élément de ce passage peut surprendre les lecteurs contemporains. Non seulement la lettre à Timothée témoigne-t-elle du fait que les épiscopes pouvaient être mariés, mais elle spécifie également qu’ils devaient avoir une seule femme. Les règles de conduite sont habituellement énoncées pour recadrer une pratique. On peut donc imaginer qu’il y avait des épiscopes polygames, mais que ce n’était pas vu comme quelque chose de bien. La façon dont l’épiscope gouvernait sa famille était importante, c’était perçu comme un reflet de sa façon de s’occuper de l’Église. Plus largement, le célibat n’était pas une pratique courante chez les premiers responsables ecclésiaux. Les évangiles transmettent l’information que Jésus a guéri la belle-mère de Pierre. Celui qui est considéré a posteriori comme le premier pape avait donc une femme. L’importance du célibat pour les ministres de l’Église commence vers le ive siècle, mais il faut attendre le xiiie siècle pour que le célibat ecclésiastique devienne une règle appliquée de façon stricte [1].

Le texte de la première lettre à Timothée se poursuit avec des recommandations du même ordre pour les diacres :

8 Les diacres, pareillement, doivent être dignes, n’avoir qu’une parole, ne pas s’adonner au vin ni rechercher des gains honteux. 9 Qu’ils gardent le mystère de la foi dans une conscience pure. 10 Qu’eux aussi soient d’abord mis à l’épreuve; ensuite, si on n’a rien à leur reprocher, ils exerceront le ministère du diaconat.

11 Les femmes, pareillement, doivent être dignes, point médisantes, sobres, fidèles en toutes choses.

12 Que les diacres soient maris d’une seule femme, qu’ils gouvernent bien leurs enfants et leur propre maison. 13 Car ceux qui exercent bien le ministère de diacre s’acquièrent un beau rang ainsi qu’une grande assurance fondée sur la foi qui est dans le Christ Jésus. (1 Timothée 3,8-13)

Les consignes concernant les diacres semblent un peu moins contraignantes. Par exemple, nulle mention d’une discipline quelconque par rapport à leur enseignement. Probablement parce que leurs responsabilités étaient moins grandes que celles des épiscopes. Par ailleurs, la recommandation d’avoir une seule femme revient aussi pour eux. Il y a cependant une grande différence pour les diacres. Le verset onze introduit des remarques particulières concernant les femmes. S’agit-il des épouses de diacres ou de femmes qui étaient elles-mêmes diacres? Ce passage est équivoque. On peut justifier les deux interprétations. Il faut cependant savoir que d’autres textes bibliques mentionnent des femmes diacres. La plus célèbre est Phébée, une collaboratrice de Paul.

1 Je vous recommande Phœbé, notre sœur, diacre de l’Église de Cenchrées. 2 Accueillez-la dans le Seigneur d’une manière digne des saints, aidez-la en toute affaire où elle aurait besoin de vous. Car elle a été une protectrice pour bien des gens et pour moi-même. (Romains 16,1-2)

Un autre élément frappe le lecteur moderne de la lettre à Timothée par son absence : celle-ci donne des recommandations aux hommes et aux femmes de l’assemblée, aux épiscopes et aux diacres, mais elle ne mentionne pas les prêtres, jadis appelés presbytres (anciens). La raison en est que ce n’est qu’avec le temps que les ministères de l’Église prendront les formes que l’on connaît aujourd’hui. Il ne faut pas faire l’erreur de projeter sur le premier siècle chrétien la structure actuelle des ministères dans l’Église.

Les responsabilités en Église

Une bonne connaissance de l’histoire de l’Église nous permet de voir l’évolution de la conception des ministères. Les responsabilités, titres et critères ont bien changé, avec le temps. Quels sont les ministères ecclésiaux dont a besoin l’Église d’aujourd’hui? Tout le monde voit qu’il y a une crise des vocations, en Occident. Que faire? Il n’y a pas de solutions simples, mais je pense qu’une bonne connaissance des textes bibliques et de l’histoire des ministères peut nous aider à y réfléchir. Le modèle des ministères de l’Église catholique actuelle n’a pas toujours été tel qu’il est aujourd’hui et il continuera d’évoluer avec le temps. D’ailleurs, le dialogue œcuménique pourrait permettre à l’Église catholique de s’inspirer d’Églises qui ont des structures ministérielles très différentes.

[1] Pour plus d’informations sur ce sujet, je vous suggère : Elizabeth Abbott, L’histoire universelle de la chasteté et du célibat, Fides, 2001.

Extrait de : Sébastien Doane, Zombies, licornes, cannibales… Les récits insolites de la Bible, Montréal, Novalis, 2015.

Sébastien Doane

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