onction de David

Onction de David par le prophète Samuel. Reuven Rubin, 1971. Lithographie, 64 x 49 cm (marché des arts).

Le roi est la lampe d’Israël

Sylvain CampeauSylvain Campeau | 26 avril 2021

C’est alors que les hommes de David l’adjurèrent, en disant : « Tu n’iras plus avec nous au combat, de peur que tu n’éteignes la lampe d’Israël. »
(2 Samuel 21, 17b)

En finale du Deuxième livre de Samuel, le roi David est comparé à une lampe pour son peuple. L’image de la lampe allumée démontre l’importance de la figure royale dans l’ancien Israël qui déborde le contexte militaire dans lequel le verset s’insère.

Éteindre la lampe est une image pour évoquer la mort du roi au combat. Le passage fait l’éloge d’un héros de l’armée de David lors des guerres menées contre les Philistins. La préoccupation des hommes de David semble être d’éviter de tomber dans le piège d’une confrontation avec l’ennemi dont l’objectif serait de supprimer le roi d’Israël. Mais cette peur de voir s’éteindre la lampe d’Israël concerne-t-elle directement le roi David ou ne parlerait-on pas ici de sa maison, de la dynastie qu’il représente?

À l’époque de la rédaction finale des livres de Samuel [1], l’institution royale a disparu. La peur exprimée dans ce verset pourrait très bien exprimer un sentiment des sages de l’époque de l’exil ou d’après l’exil : qu’adviendra-t-il de la promesse faite à David par le Seigneur?

« Devant toi, ta maison et ta royauté seront à jamais stables, ton trône à jamais affermi. » (2 Samuel 7,16)

Dans l’image de la lampe allumée, il est donc possible de déduire une implication dynastique comme dans les passages du Premier livre des Rois où la lampe associée à David est le signe d’une « maison » vivante (1 Rois 11,36 et 15,4). Un passage du livre des psaumes appuie cette interprétation : « C’est toi qui allumes ma lampe. Le Seigneur mon Dieu illumine mes ténèbres. » (Psaumes 18,29) L’expression métaphorique de la première partie du verset fait sans doute référence à la permanence de la dynastie royale. Ce qui nous amène à considérer le rite de l’onction royale pour approfondir le sens de notre verset (2 S 21,17).

Le roi, une personne sacrée

Dans l’ancien Israël, l’onction est un rite religieux réservé au roi [2]. Comme l’explique Roland de Vaux, « l’onction fait du roi une personne sacrée en relation spéciale avec Yahvé » [3]. Elle s’accompagne d’une venue de l’Esprit du Dieu d’Israël. Il n’est donc pas étonnant de lire des textes qui parlent de l’éclat du visage du roi (voir 2 S 23,4 ; Pr 16,15), ce qui nous ramène à l’image de la lampe allumée qui est un symbole de la vie (voir Job 21,17 ; Pr 20,20 ; 24,20). La vitalité du peuple repose en un sens sur son roi.

Le roi a donc un rôle de médiateur entre Dieu et son peuple. Comme la lampe qui brille dans le sanctuaire de Yahvé à Jérusalem (Ex 27,20), le roi doit veiller sur son peuple ; il est appelé à être son « messie ». Le sens du mot messie ou christ est d’ailleurs le « oint », celui qui a reçu l’onction. Mais à une époque où l’institution royale a disparu, la promesse de Yahvé commence à être projetée sur un personnage qui viendra restaurer la royauté et le Règne de Dieu. Cette réflexion prendra plusieurs siècles avant d’être reprise par les premiers chrétiens qui verront en Jésus de Nazareth le messie annoncé pour son peuple et la lumière du monde.

Diplômé en études bibliques (Université de Montréal), Sylvain Campeau est responsable de la rédaction.

[1] Pour un bref état de la recherche sur cette question, voir : Christophe Nihan et Dany Nocquet, « 1-2 Samuel », dans Thomas Römer, Jean-Daniel Macchi et Christophe Nihan, Introduction à l’Ancien Testament, Genèse, Labor et Fides, 2009, p. 365-366.
[2] C’est après l’exil que le rite de l’onction sera transféré au grand prêtre et ensuite à l’ensemble des prêtres.
[3] Roland de Vaux, Les institutions de l’Ancien Testament, tome I, Paris, Cerf, 1982, p. 175.

Les mots pour le dire

Symboles bibliques

Cette rubrique est consacrée aux symboles bibliques et paléochrétiens. L'écriture de la Bible n'aurait pas la même saveur sans ces images et leur puissance d'évocation qui réussissent souvent à exprimer l'indicible.