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Justice sociale
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chronique du 28 octobre 2011

 

Réjouissez-vous! La tour de Babel s’effondre

Occupy Wall Street

Naomi Klein, journaliste canadienne et auteur de La Stratégie du choc, était invitée à s’exprimer par le mouvement Occupy Wall Street, à New York. (extraits)

« … (en 1999) nous prenions le capitalisme au sommet d’un boom économique frénétique. Le chômage était bas, les portefeuilles d’actions enflaient. Les médias étaient fascinés par l’argent facile. À l’époque, on parlait de start-up, pas de fermetures d’entreprises.

Nous avons montré que la dérégulation derrière ce délire a eu un coût. Elle a été pré-judiciable aux normes du travail. Elle a été préjudiciable aux normes environnementales. Les entreprises devenaient plus puissantes que les gouvernements, ce qui a été dommageable pour nos démocraties…
Dix ans plus tard, il semble qu’il n’y ait plus de pays riches. Juste un tas de gens riches. Des gens qui se sont enrichis en pillant les biens publics et en épuisant les ressources naturelles dans le monde.

Le fait est qu’aujourd’hui chacun peut voir que le système est profondément injuste et hors de contrôle. La cupidité effrénée a saccagé l’économie mondiale. Et elle saccage aussi la Terre. Nous pillons nos océans, polluons notre eau avec la fracturation hydraulique et le forage en eaux profondes, nous nous tournons vers les sources d’énergie les plus sales de la planète, comme les sables bitumineux en Alberta. Et l’atmosphère ne peut absorber la quantité de carbone que nous émettons, créant un dangereux réchauffement. La nouvelle norme, ce sont les catastrophes en série. Économiques et écologiques.

Source : Bastamag.net 

Apocalypse 18, 1-24

Après cela, je vis un autre ange descendre du ciel. Il avait un grand pouvoir, et sa splendeur illumina la terre entière. Il cria avec force : « Elle est tombée, elle est tombée la grande Babylone! Maintenant, c'est un lieu habité par des démons, un refuge pour toutes sortes d'esprits mauvais; c'est là que vivent toutes sortes d'oiseaux et d'animaux impurs et répugnants. Toutes les nations ont bu le vin de sa furieuse immoralité. Les rois de la terre se sont livrés à l'immoralité avec elle et les marchands de la terre se sont enrichis de son luxe démesuré. »

Puis j'entendis une autre voix qui venait du ciel et disait: « Sortez du milieu d'elle, mon peuple, afin de ne pas être complices de ses péchés et de ne pas subir avec elle les fléaux qui vont la frapper. Car ses péchés se sont entassés jusqu'au ciel et Dieu n'a pas oublié ses ignobles actions. Traitez-la comme elle a traité les autres, payez-lui le double de ce qu'elle a fait. Remplissez sa coupe d'une boisson deux fois plus forte que celle qu'elle a fait boire aux autres. Infligez-lui autant de tourment et de malheur qu'elle s'est accordé de gloire et de luxe. Elle se dit en elle-même : "Je siège ici comme une reine, je ne suis pas veuve et je ne connaîtrai jamais le deuil." Voilà pourquoi les fléaux qui lui sont réservés vont tous s'abattre sur elle en un seul jour: maladie mortelle, deuil et famine ; elle sera détruite par le feu. Car il est puissant le Seigneur Dieu qui l'a jugée. »

Les rois de la terre, qui se sont livrés avec elle à l'immoralité et au luxe, pleureront et se lamenteront à son sujet, quand ils verront la fumée de la ville incendiée.  Ils se tiendront à bonne distance, par peur du châtiment qui est le sien, et ils diront : « Malheur! Quel malheur! O Babylone, ville grande et puissante! Une seule heure a suffi pour que la condamnation te frappe! »

Les marchands de la terre pleurent aussi et se lamentent à son sujet, parce que personne n'achète plus leurs marchandises: or, argent, pierres précieuses et perles; fines toiles de lin, précieuses étoffes rouges et écarlates, soie; toute sorte de bois rares, toute espèce d'objets en ivoire, bois précieux, bronze, fer ou marbre; cannelle et autres épices, parfums, myrrhe et encens; vin, huile, farine et blé; bœufs et moutons, chevaux et chars, esclaves et même vies humaines. « Ah! dit-on, tous les produits que tu désirais ont disparu de chez toi, toutes tes richesses et ton luxe sont perdus pour toi, et on ne les retrouvera plus jamais! »  Les marchands qui se sont enrichis en faisant du commerce dans cette ville, se tiendront à bonne distance par peur du châtiment qui est le sien. Ils pleureront et se lamenteront;  ils diront  « Malheur! Quel malheur pour la grande ville! Elle était vêtue d'un fin tissu de lin, de précieuses étoffes rouges et écarlates, elle était chargée de bijoux d'or, de pierres précieuses et de perles. Et une seule heure a suffi pour que disparaisse toute cette richesse! »

Tous les capitaines de navires et leurs passagers, les marins et tous ceux qui gagnent leur vie sur la mer, se tenaient à bonne distance et s'écriaient en voyant la fumée de la ville incendiée : « Il n'y a jamais eu de ville aussi grande que celle-ci! » Ils se jetaient de la poussière sur la tête, ils pleuraient, se lamentaient et criaient : « Malheur! Quel malheur pour la grande ville! C'est de sa richesse que s'enrichissaient tous ceux qui ont des navires sur la mer. Et une seule heure a suffi pour que tout cela disparaisse! »

Réjouis-toi de sa destruction, ciel! Réjouissez-vous peuple de Dieu, apôtres et prophètes! Car Dieu l'a jugée pour le mal qu'elle vous a fait!

Alors un ange puissant prit une pierre semblable à une grande meule à blé et la jeta dans la mer en disant : « C'est ainsi que la grande ville de Babylone sera précipitée avec violence, et on ne la reverra plus jamais. On n'entendra plus jamais chez toi la musique des harpistes et des chanteurs, des joueurs de flûte et de trompette. On n'y trouvera plus aucun artisan quelconque; on n'y entendra plus le bruit de la meule à blé. La lumière de la lampe ne brillera plus jamais chez toi; on n'y entendra plus la voix des jeunes mariés. Tes marchands étaient les plus importants du monde, et par tes pratiques de magie tu as égaré tous les peuples. »

C'est à Babylone qu'a coulé le sang des prophètes et du peuple de Dieu, le sang de tous ceux qui ont été massacrés sur la terre.                     

L’effondrement de la Mondialisation

      La mondialisation est en pleine tornade : l’Union européenne est menacée d’explosion et plusieurs pays sont à tel point endettés qu’ils risquent tout simplement la faillite. Aux Etats-Unis, Obama déçoit le pays avec ses 46 millions de chômeurs et une économie au bord de la dépression. On a investi dans le sauvetage de grandes banques à coup de milliards de dollars pour ensuite refiler la facture aux populations en coupant dans les services. Pourtant, les institutions financières récemment sauvées avec l’argent des contribuables déclarent des milliards de profits à chaque trimestre. Les gouvernements sont à la solde des grandes entreprises au détriment du bien commun.

     Dans ce contexte, je propose de relire ce magnifique texte de l’Apocalypse de Jean qui décrit l’Empire romain de son temps comme une Babylone de la confusion. Écrit dans un contexte mythique, cette prophétie nous parle aujourd’hui avec autant d’à-propos qu’aux premières communautés chrétiennes qui vivaient opprimées par le pouvoir romain. La déesse Rome y est décrite comme la grande Prostituée, assise « sur des peuples et des foules, des nations et des langues… Elle est la ville, la grande, qui a royauté sur les rois de la terre. » (Ap 17,16-18)

     Nous avons ici un texte de jugement divin historique que les témoins chrétiens voient poindre à l’horizon. Rome (appelée Babylone) est jugée à cause du sang qu’elle répand et des richesses qu’elle a accumulées : assassinats et idolâtries (prostitutions). Aujourd’hui, cette Prostituée s’appelle Mondialisation et ses grands prêtres sont de grands financiers, des gens qui se sont enrichis en pillant les biens publics et en épuisant les ressources naturelles dans le monde. Leur cupidité effrénée a saccagé l’économie mondiale et détruit la vie de milliards d’êtres humains. Sang et prostitution ! 

Reconstruire notre conscience collective

     Jean ne cherche pas seulement à encourager les disciples persécutés, il veut reconstruire la conscience de la communauté chrétienne. Ceci est bien important ; quand un régime absolu prend le pouvoir, il essaie par tous les moyens de faire accepter aux populations son autorité : répression, climat de terreur, religion, propagande, corruption, tout lui sert pour pénétrer dans le cerveau des opprimés et les obliger à se soumettre.

     Après la sortie d’Égypte, les esclaves ayant fui dans le désert revendiquent à Moïse de la viande et les oignons d’Égypte, lassés de manger de la manne. Le théologien Leonardo Boff disait à ce propos qu’il est plus facile de faire sortir les Hébreux d’Égypte que de faire sortir l’Égypte de la tête des Hébreux. Pareillement aujourd’hui, il nous est difficile de nous détacher de nos habitudes de consommation; toute notre vie est imprégnée de cette idéologie et nous avons besoin de reconstruire notre conscience. Dans la conscience de la communauté chrétienne, Rome, repaire de tous les esprits impurs, est déjà tombée. « La lecture de ce chapitre nous permet de savoir, aujourd’hui, comment à la fin du Ier siècle, au cœur de l’Empire romain, les chrétiens voyaient la réalité, ce qu’ils en pensaient et ce qu’ils ressentaient. » [1] Suivre le christ Jésus signifiait répudier l’empire de César.

     Aujourd’hui, pourrait-on dire qu’à l’intérieur des églises chrétiennes existe cette répudiation radicale du mode de vie matérialiste et individualiste dans lequel nous baignons? Ne nous sommes-nous pas accommodés à notre niveau de vie de pays développé, facilement oublieux des conséquences dramatiques que cela amène pour la grande masse des affamés et pour la vie elle-même sur notre petite planète?

Les politiciens, les entrepreneurs et les commerçants se lamentent

     Un climat de tension et de panique est perceptible chez les politiciens et les banquiers : multiplication de rencontres des grands de ce monde, pressions sur les gouvernements des pays au bord de la faillite, recherche de solutions pour sauver l’euro, plan de relance maintes fois proposé par Obama et chaque fois refusé par le Congrès. Ces puissants ont beaucoup à perdre et on constate déjà que leur monde s’effondre.

     Dans le texte biblique, les marchands énumèrent les produits qu’ils vendaient à Rome : l’or et l’argent sont au premier rang, puis suivent les pierres précieuses, les vêtements luxueux, les matériaux de construction nobles, les parfums capiteux, les aliments de choix, les animaux domestiques pour le travail et la guerre et en fin de liste, comme dernier produit de consommation, les esclaves et la vie humaine. Aujourd’hui encore la maximisation des profits passe avant les salariés et des millions d’emplois sont perdus chaque année pour améliorer le rendement aux actionnaires. Le travail humain est devenu le dernier des biens de consommation.

Sortez de cette cité, ô mon peuple !

     L’ordre que Dieu donne à son peuple est de sortir de ce système : « Sortez, ô mon peuple de chez elle, que vous ne soyez pas en communion avec ses fautes. » « Cette sortie n’est pas physique, mais économique, sociale, politique et spirituelle. » [2] Aujourd’hui c’est avec soulagement que nous voyons Wall Street et les grandes places du pouvoir financier un peu partout dans le monde être occupées par celles et ceux qui se désignent comme les 99%. Le mouvement des indigné-e-s qui s’opposent à la place occupée par la haute finance, mouvement de jeunes mobilisés avec détermination et sans violence, ce mouvement a entendu cet ordre : sortez de cette cité. Il s’agit d’une sortie spirituelle, d’une résistance aux valeurs véhiculées par le dieu argent.

     Invitée à s’adresser aux personnes qui occupent Wall Street à New-York, la journaliste canadienne Naomi Klein proclamait : « Je parle de changer les valeurs sous-jacentes qui régissent notre société… C’est ce qui se passe sur cette place, il me semble. Dans la façon dont vous vous nourrissez ou vous réchauffez les uns les autres, partageant librement les informations et fournissant des soins de santé, des cours de méditation et des formations à  l’empowerment. La pancarte que je préfère ici, c’est : « Je me soucie de vous. » Dans une culture qui forme les gens à éviter le regard de l’autre et à dire :
« Laissez-les mourir », c’est une déclaration profondément radicale. »

     L’apocalypse finit par un chant de victoire : la foule nombreuse clame sa joie, car Dieu a fait justice. La chute de la grande Prostituée est une bonne nouvelle pour les 99% : un monde nouveau peut advenir car Dieu a visité son peuple. Alléluia!

[1] Pablo Richard, L’Apocalypse, reconstruction de l’espérance, Paulines, 2002, p. 184.

[2] Pablo Richard, L’Apocalypse, reconstruction de l’espérance, p. 186.

Claude Lacaille

Source: Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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L’art d’ignorer les pauvres

 

 

 

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