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Justice sociale
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chronique du 20 mai 2016

 

Lettre ouverte au ministre

S’en prendre aux plus pauvres, ça va faire!


Monsieur Blais, votre réforme de l'aide sociale est une négation des droits et de la dignité des personnes assistées sociales. Avec le projet de loi 70, vous entretenez les préjugés à leur égard et menacez de couper leur prestation de base. En plus, l'approche obligatoire et punitive que vous souhaitez mettre en place pour forcer les personnes assistées sociales à trouver un emploi est vouée à l'échec. De nombreuses organisations, même patronales, sont allées vous le dire en commission parlementaire.

Lettre ouverte au ministre du Travail, de l'Emploi et de la Solidarité sociale, François Blais
par Serge Petitclerc, porte-parole, Collectif pour un Québec sans pauvreté, Québec

Régulièrement lors des crises économiques cycliques qui affectent nos sociétés, les gouvernements en place se tournent vers l’austérité pour rétablir la bonne santé financière. C’est dans l’erre du temps et dans les cartons du Fond monétaire international d’imposer des coupures drastiques dans les dépenses sociales pour que les pays en difficultés puissent accéder à des prêts. On a vu comment le peuple grec a été pris à la gorge et mis à genoux par les ténors de l’Union européenne.

     Le gouvernement du Québec, fort de la faiblesse de l’opposition, procède présentement à un démantèlement de la solidarité en privant l’éducation, la santé et l’aide sociale des fonds nécessaires. ‘L’État manque de ressources et ne peut assurer tous ces services; que chacun sauve sa peau, nous n’avons pas les moyens d’un pays solidaire.’ C’est pourtant dans l’évasion fiscale des super riches et des grandes compagnies que l’État pourrait récupérer ces sommes volées et cachées. C’est par une fiscalité équitable que les plus riches seraient amenés à payer leur juste part. Mais cela contredit les dogmes de la religion néolibérale qui considère toute intervention de l’État comme un péché mortel contre la liberté du marché.

     Les prophètes traversent les siècles à contre-courant des élites politiques, économiques et religieuses. Ce sont les porte-paroles de Dieu pour défendre le pauvre, la veuve et l’orphelin. Ils sont des visionnaires, des personnes au regard pénétrant, qui portent un jugement sur le péché des puissants, des prêtres et des riches et défendent la justice. Aujourd’hui, les prophètes continuent à dénoncer et à proposer des alternatives, la plupart du temps hors des religions établies, dans les soubassements de nos sociétés de consommation et d’opulence, au milieu des multitudes de poqués, d’éclopés, d’appauvris, d’exclus et des sans-voix. Leaders charismatiques ou plus souvent mouvements sociaux, syndicalistes, écologistes, pacifistes, etc.

     J’aimerais simplement rappeler les cris d’indignations de certains de ces porte-étendards de la justice sociale dans la bible, car il me semble que leur parole pénètre comme un glaive les replis de notre conscience moderne.

     Moïse établit des normes destinées à la protection des individus contre la déchéance de la pauvreté. Le pauvre doit être protégé et soulagé; il ne doit pas être rejeté de la société.

« Si ton frère devient pauvre et faiblit dans ses affaires avec toi, réconforte-le, immigré ou hôte, qu’il vive avec toi. Ne lui extorques ni intérêt ni usure. Crains ton Dieu. Que ton frère vive avec toi. Ne lui prête pas d’argent avec intérêt; ne fais pas de profit sur sa nourriture. » (Lévitique 25, 35-38)

     Amos, le berger, vient questionner les élites de Samarie qui vivent dans l’abondance sans se soucier des pauvres. Sa parole fougueuse exprime la colère de Dieu devant l’oppression.

« Écoutez ceci vous qui piétinez les pauvres, anéantissez les humbles du pays en disant : par l’argent nous achèterons les faibles; nous achèterons le pauvre pour une paire de sandales… Yahvé le jure, jamais ne n’oublierai ce qu’ils ont fait. » (8, 4-7)

     Isaïe commence son témoignage avec une charge contre la corruption de Jérusalem.

« Comment a-t-elle fini putain, la ville indéfectible où le droit fleurissait? La justice va loger à l’enseigne des assassins, ton argent n’est plus que déchet, ton vin coupé d’eau. Tes chefs, des crapules, une bande de voleurs; ils ne crachent pas sur les pots-de-vin, ils profitent des privilèges. Ils déboutent l’orphelin et la cause de la veuve n’arrive pas jusqu’à eux. » (1, 21-23)

     Jésus se caractérise par la résistance à l’oppression de Jérusalem et de Rome. Il s’est fait proche des pauvres et des affligés en les relevant et a qualifié le gouvernement de son peuple par  les grands prêtres de « repaire de bandits » (Mt 21, 13)

« En marche, ceux qui sont à bout de souffle. En marche, les affamés et assoiffés de justice. » (Matthieu 5, 3.6)

« Venez à moi, vous qui êtes inquiets et accablés. Je vous ferai trouver le repos. (Mt 11, 30)

« Éloignez-vous de moi, maudits! J’avais faim et vous ne m’avez pas nourri. J’avais soif. Vous ne m’avez pas donné à boire. J’étais un étranger. Vous m’avez fermé votre porte. J’étais sans vêtements. Vous ne m’avez pas vêtu. J’étais malade, j’étais au cachot. Vous n’avez rien fait pour moi. » (Mt 25, 42-44)

     Le bibliste André Myre écrit ceci : « La résistance n’est pas qu’un trait marginal de l’activité de Jésus, elle la caractérise. Parce qu’il espère un avenir pleinement humain pour sa terre bien-aimée, il résiste de toutes ses forces aux pressions qui la défigurent, qu’elles soient d’origine politique, militaire, économique, sociale, familiale ou religieuse. Ses semblables, il les veut sains de corps et libérés des contraintes que les pouvoirs en place font peser sur les consciences. La liberté intérieure est finalement la plus belle des résistances, celle qui effraie le plus les puissants puisqu’elle attaque leur autorité dans son essence même. » [1]

     Devant les agressions légales et violentes des élites politiques et économiques contre la vie des Québécoises et Québécois les plus appauvris, sachons résister et promouvoir la solidarité d’un peuple avec chacun de ses membres sans exception. Défendre la vie ne se limite pas au respect du fœtus ou à assurer une mort digne : entre la naissance et la mort, se trouvent les défis de vivre dignement et avec bonheur de l’enfance à la vieillesse. L’Église québécoise, déboussolée, voudrait relancer sa mission. Au lieu de s’attarder à sauver les vieux meubles de nos ancêtres, l’institution pourrait réveiller sa vocation prophétique somnolente et s’identifier résolument avec les plus pauvres. C’est au milieu des plus petits que nous retrouverons le Souffle du ressuscité.

[1] André Myre,« Jésus le résistant », revue Relations 783, mars-avril 2016, p. 28.

Claude Lacaille

Source: Toute reproduction de ce commentaire, à des fins autres que personnelles, est interdite sans l'autorisation du Centre biblique de Montréal.

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Avons-nous réveillé un monstre ?

 

 

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