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La lampe de ma vie
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chronique du 7 juin 2002
 

Les miracles de Jésus, racontés aux enfants
 

QuestionJ'enseigne à des petits de cinquième année. Je constate que dès ce jeune âge, ils sont de plus en plus critiques. Ils considèrent les récits de miracles, par exemple, comme peu crédibles. Je suis personnellement persuadée qu'il s'y trouve quelque chose, mais je n'arrive pas à leur expliquer convenablement. Auriez-vous des suggestions? (J. Arcand)

RéponseJ'ai déjà été confronté à la même situation. Il y a vingt ans, cependant, le sens critique était plutôt chez les adolescents... Le monde continue de changer. Dans votre question, il y a trois défis. Tout d'abord, celui de saisir, en tant qu'adultes - pour nous-mêmes ! -, la notion de ce que les évangiles appellent « miracles » ou « signes ». Surtout dans le contexte actuel. Ceci est d'autant plus important que, aujourd'hui, on tend à manifester clairement un certain scepticisme face à « l'extraordinaire » ou le « surnaturel ». Ensuite, vient la quête de signification, qui lui est associée. Finalement, il nous faut trouver une manière de « bien dire les choses » pour des enfants ou des adolescents. Allons-y par étapes.

Qu'est-ce qu'un « miracle »?

     Dans les évangiles de Marc, Luc et Matthieu, le terme grec le plus fréquent est dynamis, qu'on peut traduire librement par « actes de puissance ». Je trouve cela plus révélateur que « miracle », car ce dernier terme est coloré par notre culture. Très souvent, on en fait un événement ou un phénomène qui dépasse les lois de la nature ou qui ne trouve son explication que dans le « surnaturel ». Dommage.

     La traduction « acte de puissance » met surtout l'accent sur le caractère exceptionnel de ce qui est arrivé, que cela dépasse l'habituel ou le normal pour un être humain. Pris dans son ensemble, le ministère de Jésus comportait une part de choses qui sortaient de l'ordinaire. Même ses ennemis le reconnaissaient. Pour son entourage, Jésus n'est pas homme comme les autres: par ses paroles et par ses actes. Aujourd'hui, il arrive que l'on questionne le bien-fondé de tel ou tel récit, mais globalement, il est admis que Jésus a posé des gestes qui, à son époque, étaient perçus comme exceptionnels, hors du commun.

     Contrairement à ce que l'on a déjà dit, les « actes de puissance » de Jésus ne « prouvent » pas que Jésus était Fils de Dieu. Si c'était le cas, ils ne soulèveraient pas de questions et de débats sur l'identité de l'auteur. Or les évangiles nous présentent clairement des désaccords sur sa personne. Les miracles n'imposent pas une seule interprétation. Les « miracles » posent question: ils dérangent, bousculent, ébranlent les convictions trop ancrées. Les « actes de puissance » provoquent la réflexion : « qui est-il, celui qui accomplit de telles choses? » Voilà leur principal mérite.

Des « signes » à décoder

     L'évangile de Jean n'emploie pas le terme dynamis mais plutôt sèmeion que l'on traduit par « signe ». Jésus a accompli des « signes ». Chaque acte étonnant ou surprenant pointe vers une réalité plus grande encore. Déjà, on voit poindre cette conviction dans les premiers évangiles, mais nul ne l'explicite comme Jean. La multiplication du pain éveille la communauté sur « qui est le vrai pain descendu du ciel ». Jésus a parlé à travers ce qu'il a fait. Les gestes pointent en une direction, plus belle, plus profonde que le seul événement raconté. Les évangélistes n'ont pas raconté la vie de Jésus dans le moindre détail, mais ils ont raconté ce qui était porteur de sens, de vérité - au sens religieux. À travers les récits de la vie de Jésus, nous accédons à une vérité beaucoup plus profonde. Or, la signification des récits de « miracles » est toujours actuelle. Il suffit parfois de la présenter convenablement.

Que faire alors?

     J'aurais quatre recommandations à vous faire. Comme on dit au Québec, « ça vaut ce que ça vaut ».

1) D'abord, renseignez-vous!

     La première étape pour vous: prenez le temps de lire et de réfléchir. Renseignez-vous sur ce qu'est un « miracle », et la compréhension moderne de ces récits évangéliques. Il faut d'abord que vous clarifiiez pour vous cet aspect de la vie publique du Nazaréen. Sans cette fondation, vous balbutierez devant les enfants. Sentant votre insécurité, ils auront tôt fait de détourner votre attention de ce qui importe vraiment.

2) Les moyens de Jésus ne sont pas les nôtres.

     J'ai toujours eu beaucoup de succès en distinguant les « moyens de Jésus » et les nôtres. Il est très facile de faire comprendre cela aux enfants: Jésus avait des habiletés et des compétences que nous n'avons pas. Ils constatent aisément que, dans leur seule école, les habiletés sont variées, que certains enfants sont capables de certaines choses que les autres ne peuvent accomplir. Certains ont même des talents exceptionnels. Jésus avait une habileté toute particulière: celle de relever les gens exclus ou blessés, de guérir les coeurs - surtout - et les corps - la guérison du corps étant souvent décrite comme la conséquence de la première guérison. Constat: passons à autre chose.

3) Insistez d'abord sur la signification des récits.

     Mais en bout de ligne, ce qui importe c'est le sens de ce qu'il a fait. Dans quelle direction Jésus agissait? Quel était le sens de sa mission? Il m'est arrivé, à plusieurs reprises, de présenter cela comme un jeu, ou une « course au trésor »: Pourquoi Jésus a-t-il fait cela? Qu'est-ce qu'il voulait nous dire? En insistant sur le sens, les jeunes étaient moins préoccupés par la dimension historique de tel ou tel récit. Poser la question du sens, pour Jésus, c'est inévitablement questionner ses propres motivations.

4) Des gestes qui posent questions, aujourd'hui.

     Pour moi, la grande clé demeurait la transposition, ou l'analogie. Qu'est-ce qui, aujourd'hui, bousculerait, dérangerait ou poserait question? Je l'aborde généralement par l'angle de l'incompréhension: quels gestes, aujourd'hui, porteraient le même message et seraient « aussi dérangeants » que ceux de Jésus. Et particulier avec les adolescents, j'ai toujours eu beaucoup de succès avec cette approche que je qualifierais d'« anti-conformiste ». Et puis, elle a le mérite d'être bien ancrée dans la tradition biblique: le geste prophétique. Puissant, théâtral, mais profondément révélateur d'une dimension plus profonde de la vie. En d'autres mots: toutes nos habiletés au service de ce que l'on veut dire.

     Durant mes années d'enseignement et dans l'animation de camps pour adolescents, je dois avouer que cette approche a remporté un vif succès. J'espère que ces quelques pistes vous auront éclairée. Bonne chance!

Guylain Prince, ofm

Chronique précédente :
Quand on subit le rejet

 

 

 

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