La guérison du paralytique. Mosaïque, basilique Saint-Apollinaire-le-Neuf (Ravenne).

Le paralytique de Capharnaüm 2/2

Roland BugnonRoland Bugnon, CSSP | 27 novembre 2017

Lire Marc 2,1-12

Le pardon offert par Jésus ne va pas de soi. Dans la chronique précédente, nous avons vu que lorsque Jésus pardonne le paralytique, on l’accuse de blasphème. Jésus n’est pas dupe de ce qui se passe. Il a vu les visages se refermer et compris les raisons du changement d’atmosphère. Ses détracteurs lui dénient le droit d’annoncer la miséricorde de Dieu pour ce paralytique. Pour tenter de mettre les choses au point et, qui sait, les faire évoluer dans leur intransigeance, il leur pose une question. « Qu’est-ce qui est le plus facile ? Dire à ce paralysé : “Tes péchés sont pardonnés”, ou bien lui dire : “Lève-toi, prends ton brancard et marche” ? ». Ils ne peuvent que répondre : « Ni l’un ni l’autre ». Les deux actes relèvent de la toute-puissance de Dieu. Mais dans la situation où ils sont, personne ne lui répond. Pour leur montrer en quelque sorte qu’il n’usurpe pas de l’autorité de Dieu, il ajoute: « Eh bien ! Pour que vous sachiez que le Fils de l’homme a autorité pour pardonner les péchés sur la terre… – Jésus s’adresse au paralysé – je te le dis, lève-toi, prends ton brancard, et rentre dans ta maison. ». La réaction de l’infirme ne se fait pas attendre. Se levant aussitôt, il fait ce que Jésus lui demande. Il est guéri, remis sur ses deux pieds, rétabli dans son intégrité psychique et physique.

Pourquoi commencer par une guérison ?

Une question se pose. Pourquoi Marc commence-t-il son évangile par des récits de guérison? On s’en rend compte très vite. Dans un premier temps, il cherche à montrer que Jésus est Bonne Nouvelle pour tous les éclopés de la vie. Toute personne, qu’elle soit lépreuse ou paralysée, peut mettre en lui son espérance. Il est la source de vie. Il ne vient pas nous faire la morale, il vient nous aider à sortir des pièges dans lesquels nous sommes tombés, nous libérer de nos chaînes et nous faire sortir des tombeaux dans lesquels nous nous sommes enfermés. Une seule condition est posée : accueillir sa parole dans la foi, oser se remettre sur ses pieds. Cela dit, Marc tient à montrer à ses lecteurs que la foi en Jésus ne va pas de soi. Ses paroles suscitent d’emblée la polémique et une opposition qui ne cessera de croître. Cela fait deux mille ans que la Bonne Nouvelle de Jésus Fils de Dieu est proclamée. Il y a toujours ceux et celles qui l’accueillent avec joie et ceux et celles qui n’y voient aucun intérêt ou s’y opposent.

Dieu de tendresse et de pitié, lent à la colère et plein d’amour… Voilà bien, Seigneur, le nom qui résonne dans la bouche des prophètes et du psalmiste. La longue méditation de ta parole leur a permis de te connaître. Ils ont appris dans leur chair que tu n’abandonnes jamais ton peuple. Pourquoi ton Fils Jésus éprouve-t-il tant de difficultés à te faire connaître en vérité ? Pourquoi les responsables religieux éprouvent-ils tant de peine à actualiser ton Nom, préférant souvent la lettre de la Loi. Toi qui éprouves tant de joie à voir l’humain debout. Libère-moi des préjugés qui me bloquent dans la vie et redonne-moi la capacité et la force de manifester ton visage de paix et d’amour dans l’ensemble de mon comportement.

Un appel au lecteur

Jésus ne cherche pas à polémiquer avec ses détracteurs et n’attend pas de réponse à la question qu’il a posée. Il se tourne vers l’assistance et annonce : « Pour que vous sachiez que le Fils de l’homme a autorité pour pardonner les péchés sur la terre… » Il tient à montrer à tous la légitimité de sa parole. Puis il s’adresse directement au paralytique : « Je te le dis, lève-toi, prends ton brancard, et rentre dans ta maison. » Je te le dis, lève-toi ! Une relation de confiance totale s’est constituée entre lui et le paralytique. Il commence par l’appeler à retrouver en lui la force qui lui permet de se remettre debout, invitation à croire en lui-même et ses propres capacités. Ce paralysé prend le visage de toutes ces personnes que les problèmes de l’existence ont précipitées à terre et qui gisent là, sans oser faire le moindre geste, tellement elles sont convaincues qu’elles ont tout raté, qu’elles ne valent rien, qu’elles ne parviendront jamais à sortir de leurs problèmes de dépendance… Pour sortir du trou, il suffit parfois d’entendre la parole de bonté qui libère l’esprit de ses chaînes et invite à renaître, à se remettre debout et à marcher. Lève-toi ! Ces mots deviennent un appel au lecteur à découvrir en Jésus la parole créatrice qui remet debout et permet à chacun de retrouver en soi la force qui libère.

« Je te le dis, lève-toi ! » J’entends ces paroles, Seigneur. Tu me les adresses à moi également. Combien de fois ne suis-je pas resté en panne, sans imagination ni désir d’aller plus loin. Il est vrai que le chemin est long, semé d’embûches et de bonnes raisons de retourner en arrière. Fais retentir en moi cette parole qui met en œuvre des forces nouvelles. Pour que je continue ma route vers cet horizon où se déploie mon avenir. Seigneur, redonne-moi force et confiance ; que je me reprenne ma marche quand la fatigue, le manque d’imagination et la lassitude me bloquent en chemin et rendent mon existence stérile.

Habiter sa propre humanité

Prends ton brancard, et rentre dans ta maison. Voilà d’autres mots chargés de sens. Il n’y a pas là qu’un simple souci de rangement. L’invitation est d’un autre ordre. Ce qu’il faut ranger et mettre au placard, ce sont toutes les mauvaises raisons qui poussent le paralysé à l’immobilisme. Ce dernier est invité à marcher sur ses deux jambes et à reprendre sa vie propre. Il n’a plus besoin de tous ces faux-semblants et ces justifications sans fondement qui le maintiennent dans sa dépendance, son immobilisme et son inactivité. Les dernières paroles de Jésus vont bien dans ce sens. « Rentre dans ta maison. » Si je voulais les exprimer en langage plus moderne, j’utiliserais des expressions comme « Retrouve ton être ! » ou encore « Sois toi-même ! » La paralysie a empêché l’homme d’habiter sa propre humanité. Durant le long cheminement qui permet à chaque personne de s’édifier progressivement, il est normal que l’on cherche des points d’appui nécessaires. Mais il y a un moment où il faut s’édifier dans la liberté de ses propres choix et décisions. Cette liberté est particulièrement précieuse. C’est par elle que chacune, chacun devient pleinement la personne qu’elle est appelée à être devant Dieu et les autres. Cet appel, il s’adresse peut-être à toi ou à moi. Qu’en penses-tu ?

Roland Bugnon est membre de la congrégation du Saint-Esprit. Après 17 ans de ministère pastoral et d’enseignement en Centrafrique, il est revenu dans son pays, la Suisse. D’abord à Bâle, puis à Fribourg, il s’est  investi dans des tâches d’animation spirituelle et biblique. 

Caravane

La lampe de ma vie

Les événements de la vie nous confrontent et suscitent des questions. Si la Bible n’a pas la réponse à toutes nos questions, telle une lampe, elle éclaire nos existences et nous offre un certain nombre de repères.