PHILIPPES 3/4

Le culte rendu au Christ

Basilique de Philippes © Danièle Durif
Site antique de Philippes. Basilique chrétienne antique, sur les lieux où Paul a prêché.

Philippes, novembre 60. Peu de jours après mon arrivée à Philippes, Lydia m'invita, le premier jour de la semaine, à me joindre à la communauté qui se réunissait chez elle. Au cours de cette assemblée, le responsable de la communauté présida le repas du Seigneur. Il rappela certaines paroles de Jésus au sujet de l'humilité et les appliqua à la vie de la communauté secouée par quelques tensions internes. Il rompit ensuite le pain en mémoire de Jésus mort et ressuscité, accomplissant ainsi l'ordre que Jésus avait laissé à ses apôtres la veille de sa mort. Des psaumes et des hymnes tout à fait nouvelles, entrecoupés de prosternations et de prières adressées à Dieu le Père, ajoutaient à l'atmosphère festive.

Le fait d'adresser des hymnes au Christ et de se prosterner devant lui est une pratique qui ne pouvait laisser personne indifférent, tant les Grecs que les Juifs. Les premiers acceptaient bien de se prosterner devant le roi, considéré plus ou moins comme un homme déifié, ou de prier les dieux pour obtenir une faveur, une guérison ou leur clémence; les seconds ne se prosternaient que devant Dieu et s'adressaient à lui avec beaucoup de respect pour sa transcendance. Pour les uns et les autres, il était impensable d'agir de la sorte devant un homme. Mais Jésus n'était pas un homme ordinaire. N'avait-on pas donné sa foi au Christ parce que, selon le témoignage de ceux qui l'avaient vu et accompagné durant trois ans, la puissance de Dieu était à l'œuvre chez lui depuis sa venue dans le monde jusqu'à sa résurrection et sa glorification auprès de Dieu? Et la résurrection n'était-elle pas la révélation éclatante de la filiation divine de Jésus, le sceau apposé par Dieu authentifiant la vérité de la parole et de l'action de son Fils? Tel était l'objet de l'hymne chantée au cours de la célébration.

Cette hymne raconte l'« histoire » du Fils de Dieu : son humble incarnation, son humiliation sur la croix, sa glorieuse résurrection et son exaltation par le Père. Un contraste saisissant est établi entre la pauvreté du Fils de Dieu, qui s'est dépouillé volontairement de toute la puissance divine pour partager, dans l'humilité, notre condition humaine, et la situation actuelle du Christ Jésus qui, dans son humanité envahie par la gloire de Dieu, est vivant auprès du Père et partage sa souveraineté sur l'univers. Non seulement Jésus a-t-il privilégié l'humilité pour se faire entièrement disponible au projet du Père et solidaire des hommes et des femmes, mais il a fait de l'humiliation de la croix le signe de l'amour fou de Dieu pour l'humanité. Malgré ceux qui s'étonnent devant leur agir, les chrétiens ont raison de rendre un culte au Christ Jésus, puisque l'adoration qu'ils lui vouent rejoint le Père qui a manifesté par lui la puissance de son amour.

Pour en savoir plus long...

Sur la prière des premiers chrétiens, lire les Ac 2,42-47; 4,23-31.
Sur l'hymne au Christ, lire Ph 2,1-11. On pourra aussi prendre connaissance d'autres hymnes chrétiennes anciennes dans Col 1,15-20; Ep 1,3-14. Le prologue de l'Évangile selon saint Jean est également une hymne ancienne (Jn 1,1-18).
Il arrive souvent à Paul d'inviter les membres des communautés chrétiennes à rendre gloire au Seigneur par des hymnes et des psaumes. On peut lire à ce sujet Ep 5,19-20 et Col 3,16-17.

Yves Guillemette

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